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Dates : 23 novembre 1944 â 2 fĂ©vrier 1945.
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AprĂšs la prise de Strasbourg par la 2e division blindĂ©e du gĂ©nĂ©ral Leclerc, toute lâattention des AlliĂ©s se portĂąt dĂ©sormais sur la « poche de Colmar ». Celle-ci reprĂ©sentait un saillant qui sâenfonçait dans les lignes alliĂ©es Ă environ 30 km au sud de Strasbourg jusquâĂ Rosenau, au sud de Mulhouse, tenu par la XIXe arme allemande, soit prĂšs de 50 000 soldats.
Lâartillerie française Ă©tait positionnĂ©e sur le Rhin, Ă quelques kilomĂštres de BĂąle. Celle-ci pilonna les positions allemandes Ă Baden, sur la rive est du fleuve. Les gares de triages furent dĂ©molies et le trafic ferroviaire interrompu avec la Suisse. Des feux commencĂšrent Ă se propager dans la ForĂȘt Noire. Comme les bacs sur le Rhin avaient Ă©tĂ© dĂ©truits, des unitĂ©s allemandes piĂ©gĂ©es sur la rive ouest avaient dĂ» se rĂ©fugier en Suisse. Le 29 novembre, la 2e DB du gĂ©nĂ©ral Leclerc prit Erstein, Ă 15 km au sud-ouest de Strasbourg. Les positions de la XIXe armĂ©e allemande cĂ©dĂšrent et les AlliĂ©s purent resserrer leurs lignes autrour de la poche, de SĂ©lestat Ă Thann.
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Carte de la poche de Colmar (20 janvier-5 février 1945)
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Le 7 décembre 1944, de Lattre envoya la IÚre armée française effectuer une offensive contre la poche de Colmar. Le 10, Thann fut libérée par la 2e division marocaine . Le 18 décembre, Kaysersberg et Ammerschwihr furent libérées. La IÚre armée française était maintenant à 6 km de Colmar.
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LâOPĂRATION VENT DU NORD
Le 1er janvier 1945, Hitler dĂ©clencha lâopĂ©ration Nordwind (« Vent du Nord »). Celle-ci consistait en une offensive nocturne contre les positions alliĂ©es sur un front de 75 km, entre SarrebrĂŒck et Strasbourg, pour soulager les troupes qui prenaient part Ă lâoffensive des Ardennes. Elle fut conduite par la IĂšre armĂ©e du gĂ©nĂ©ral Hans von Obstelfeder et avait pour objectif dâexploiter la faiblesse du VIe groupe dâarmĂ©es amĂ©ricain causĂ©e par le repli de certaines de ses forces dans les Ardennes, plus au nord. Strasbourg Ă©tait de nouveau menacĂ©e par les troupes allemandes.
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Troupes de la IÚre armée française à Colmar, le 2 février 1945
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LA DĂFENSE DE STRASBOURG
Le 3 janvier Ă Versailles, la IĂšre armĂ©e amĂ©ricaine, dont faisait partie la 2e DB, reçut lâordre de se replier au nord de lâAlsace et dâĂ©vacuer Strasbourg pour occuper la crĂȘte des Vosges. De Gaulle rĂ©agit immĂ©diatement en confiant Ă de Lattre la mission de dĂ©fendre Strasbourg, « avec ou sans lâaccord du commandement amĂ©ricain ». Vers 16 h, de Gaulle voit Eisenhower et Churchill au QG amĂ©ricain. Il persuade Eisenhower dâannuler lâordre dâĂ©vacuer Strasbourg et le nord de lâAlsace.
Le 5 janvier, les Allemands franchirent Ă nouveau le Rhin, mais dans lâautre sens, et Ă©tablirent une tĂȘte de pont Ă Gambsheim, Ă 20 km au nord de Strasbourg. Le 7, les forces allemandes effectuĂšrent une offensive en tenaille sur Strasbourg. Au nord, ils attaquĂšrent la VIe armĂ©e amĂ©ricaine vers Haguenau. Au sud, venant de la poche de Colmar, ils firent une percĂ©e sur Erstein dans les lignes de la IĂšre armĂ©e française.
Le 20 janvier, lâopĂ©ration « Vent du Nord » avait permit aux Allemands de se rapprocher Ă 13 km de Strasbourg, ce qui provoqua une vĂ©ritable panique. RegroupĂ©e entre Sarreguemines et Bitche, la 10e Panzerdivision Ă©tait Ă lâavant-garde de lâoffensive menĂ©e sur Saverne et Strasbourg. Elle avait reprit Sessenheim et fait sa jonction avec les unitĂ©s ayant franchi le fleuve. Ces forces continuaient leur offensive vers le sud de lâAlsace. Leur but Ă©tait de rejoindre et de dĂ©gager Colmar et dâouvrir ainsi la voie au-delĂ des Vosges. Lâobjectif allemand Ă©tait que les forces du groupe dâarmĂ©es de Blaskowitz (groupe dâarmĂ©es G) parviennent Ă enfoncer le VIe groupe dâarmĂ©es franco-amĂ©ricain, qui contrĂŽlait un front de 120 km de large.
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Affiche publiée dans Colmar le 3 février 1945 (rédigée le 2)
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Pour empĂȘcher cette manĆuvre qui aurait pu avoir de terribles consĂ©quences chez les AlliĂ©s, la IĂšre armĂ©e française lança une attaque massive visant Ă rĂ©duire la poche de Colmar. Mais le temps glacial (-20 °C), la visibilitĂ© trĂšs faible et les tempĂȘtes de neige rendirent encore plus difficiles les opĂ©rations qui Ă©taient conduites sans appui aĂ©rien, tant les conditions atmosphĂ©riques Ă©taient mauvaises.
Le 23 janvier 1945, la IĂšre armĂ©e française avait arrĂȘtĂ© lâoffensive allemande « Vent du Nord » devant Strasbourg. Le gĂ©nĂ©ral Eisenhower Ă©tait prĂȘt Ă laisser la ville retomber aux mains des Allemands, pourvu que cela facilitĂąt la retraite de sa VIe armĂ©e. Le GĂ©nĂ©ral de Gaulle menaça de retirer ses troupes du commandement alliĂ© si Strasbourg Ă©tait sacrifiĂ©e. Eisenhower cĂ©da, mais laissa aux Français la responsabilitĂ© de dĂ©fendre la ville. Le 25 janvier, le 21e corps amĂ©ricain vint renforcer les troupes de de Lattre.
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LA LIBĂRATION DE COLMAR
Le 27 janvier, des unitĂ©s de la 5e DB française et la 3e DI amĂ©ricaine investirent Jebsheim, Ă lâest de Colmar, et atteignirent le canal de Colmar. Le 1er corps du gĂ©nĂ©ral BĂ©thouart pĂ©nĂ©trĂąt dans la poche par le sud, et le 2e corps du gĂ©nĂ©ral de Montsabert par le nord.
Le 2 février, Colmar était libéré.
Le 3, le commandement allemand ordonnait lâĂ©vacuation de la poche.
Le 9 fĂ©vrier 1945, de Lattre envoya ce communiquĂ© : « Au 21e jour dâune Ăąpre bataille au cours de laquelle les troupes amĂ©ricaines et françaises ont rivalisĂ© dâardeur, de tĂ©nacitĂ© et de sens manĆuvrier, lâennemi a Ă©tĂ© chassĂ© de la plaine dâAlsace et a dĂ» repasser le Rhin. »
Ce communiqué reflÚta parfaitement la réalité.
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Source : Catherine et Jacques Legrand dir. Chronique de la Seconde Guerre mondiale. Ăditions Chronique, novembre 2002