Lâhistoire du petit chien curieux commence dans un lieu reculĂ© de la forĂȘt. Un petit passage abandonnĂ© gĂźt sous les arbres. On dirait que des siĂšcles se sont Ă©coulĂ©s sans quâune personne nâait franchi le seuil de sa porte. Le petit chien est saisi dâeffroi et nâose pas sâaventurer dans la pĂ©nombre de ces lieux, de peur dây faire une mauvaise rencontre.
Pourtant, une petite graine de curiositĂ©Â commence Ă germer en lui. Le jour suivant, il revient et se rapproche un peu plus de l'endroit, sans toutefois oser faire un pas de plus que la veille. Le soleil commence Ă chauffer son pelage et la tempĂ©rature devient rapidement insupportable. Le petit chien a besoin dâun abri pour se protĂ©ger des dangereux rayons du soleil.
Chassant ses derniers doutes, il se dĂ©cide Ă entrer. La piĂšces est complĂštement inhabitĂ©e. âBonjour !â, sâĂ©crit le chien, sans quâaucune voix ne lui rĂ©ponde. Câest alors quâil aperçoit, nichĂ© dans un recoin , un escalier. Le frĂȘle animal dĂ©cide de sâen approcher. Il ne voit toujours personne. Il monte alors les marches quatre Ă quatre. Câest Ă ce moment prĂ©cis que lâhistoire du petit chien curieux va changer Ă jamais.
Alors que le petit chien finit de monter les marches de lâescalier, il se retrouve plongĂ© au cĆur dâun immense salon. Câest lĂ quâil va dĂ©couvrir quelque chose quâil nâattendait absolument pas. Dans le salon, une centaine de chiens, petits comme lui, sont massĂ©s. Ils semblent ĂȘtre en train de lâattendre .
Sans savoir pourquoi, Ă cet instant prĂ©cis, le petit chien curieux ressent une vague de bonheur lâinonder. Les autres lui paraissent trĂšs aimables. VoilĂ pourquoi il dĂ©cide soudainement de lever sa patte et de les saluer. Ce Ă quoi les autres chiens rĂ©pondent sans se faire attendre. Le petit chien pousse alors un aboiement, en signe dâamitiĂ©. Une fois encore, les autres dĂ©cident de lâimiter. âQuel endroit fort agrĂ©able !â se dit le petit chien. âJe reviendrai dĂšs que je le pourrais !â.
AprĂšs quelques jours, câest un autre petit chien qui dĂ©cide de se prĂ©senter devant le passage . Un petit chien diffĂ©rent, plus peureux et plus craintif. Comme notre ami le curieux, il ressent dâabord de la peur Ă lâapproche de ce lieu abandonnĂ©. Il dĂ©cide de de se maintenir Ă bonne distance de cet endroit qui lui paraĂźt, de prime abord, inhospitalier.
Le second petit chien dĂ©cide dâexplorer les alentours , pour y dĂ©couvrir des recoins parfaitement agrĂ©ables. Sâil revient souvent prĂšs du lieu mystĂ©rieux, câest pour mieux garder ses distances. Mais câĂ©tait sans compter sur une pluie torrentielle qui sâabat sur son pelage et ne lui laisse plus quâun seul choix possible : celui dâentrer !
Tout comme le premier, il franchit le seuil de la porte dâun air un peu craintif et suspicieux. Alors quâil observe ses alentours avec un empressement qui ne saurait dissimuler sa peur, il aperçoit lui aussi les escaliers, sans toutefois sâen approcher. Il attend que la pluie passe, mais il est de plus en plus saisi par le froid. Peureux mais pas stupide, il sait quâil trouvera de la chaleur sâil parvient Ă Â surmonter son angoisse et Ă monter les escaliers. Il dĂ©cide alors de sây risquer.
Au fur et Ă mesure quâil gravit les marches, le grand salon se rĂ©vĂšle Ă lui. Alors quâil pensait ĂȘtre parfaitement seul, il se rend compte de son erreur en contemplant des centaines de petits chiens qui, comme lui, avaient trouvĂ© refuge dans la cabane abandonnĂ©e. ImmĂ©diatement, il se met en garde et se tient prĂȘt Ă attaquer le premier venu. Derechef, les autres chiens lâimitent. Le petit chien peureux aboie avec toute son agressivitĂ©, ce Ă quoi ses semblables lui rĂ©pondent immĂ©diatement. Comme il peut, transit par la peur, il dĂ©vale les escaliers et sâenfuit de la maison. âJamais je ne reviendrai !â se dit-il. âQuel endroit dangereux !â.
Il sâest enfui si rapidement quâil nâa pas eu le temps dâapercevoir un petit Ă©criteau qui gĂźt sur le sol. Comme une sorte dâavertissement. Ce panneau affiche âarbre des miroirsâ. Ni le premier, ni le second chien nâavaient vu que ce qui sâoffrait Ă leurs yeux nâĂ©tait que le reflet de leur propre image.
Lâhistoire du petit chien curieux offre Ă nos yeux une rĂ©alitĂ© que souvent nous ne voulons pas voir. Ce que nous voyons chez les autres nâest souvent que le reflet de ce que nous sommes. Dans le mĂȘme temps, nous recevons de nos semblables quelque chose de similaire Ă ce que nous leur donnons. Celui qui se lie au monde de maniĂšre bienveillante, reçoit de lâamabilitĂ©. Celui qui le fait de maniĂšre agressive, reçoit la mĂȘme chose.
Les ĂȘtres humains viennent au monde gĂ©nĂ©tiquement dotĂ©s dâune grande sociabilitĂ©. Nous naissons pour vivre en groupe. Câest une composante de notre constitution biologique et culturelle. Nous pouvons parfois nous montrer Ă©goĂŻstes, mais le groupe est toujours lâhorizon de tout. VoilĂ pourquoi les autres sont un facteur de rĂ©fĂ©rence indispensable. Nous pourrions dire quâils agissent comme une âmaison des miroirsâ. Ce que nous voyons en eux est grandement influencĂ© par ce que nous voyons en nous, comme dans le cas du conte du petit chien curieux.
Lorsque nous avons des difficultĂ©s avec le monde qui nous entoure, nous devons nous demander, en premier lieu, si nous nâen sommes pas les responsables, avant dâaccuser les autres. Est-ce le monde autour de nous qui nous fait dĂ©faut ? Ou sommes-nous Ă lâorigine du lien nĂ©gatif qui nous unit Ă tout ce qui nous entoure ? Lâhistoire du petit chien curieux nous amĂšne prĂ©cisĂ©ment Ă nous poser cette question....Â