Quâest-ce que le blob : un animal ou un vĂ©gĂ©tal ?
Ni l'un, ni l'autre ! Et ce n'est pas un champignon non plus. Ainsi baptisé en référence à un film d'horreur américain, le "blob" est en fait une cellule géante à plusieurs.
Le blob interpelle par son Ă©trange physique. Peut-ĂȘtre lâavez-vous dĂ©jĂ croisĂ© au dĂ©tour dâun chemin forestier, sous la forme dâun tapis mousseux jaune, sans vous douter que vous aviez sous les yeux un casse-tĂȘte pour lâarbre du vivant.
Â
Car reprenons : plus connu sous le nom de Physarum polycephalum, le blob a trĂšs longtemps Ă©tĂ© rangĂ© avec les⊠champignons. Dâailleurs, la plupart des articles historiques sur le sujet se trouvent dans des revues consacrĂ©es Ă la mycologie. Ensuite, il fut classĂ© chez les protistes, un rĂšgne fourre-tout abandonnĂ© aujourdâhui. Depuis le sĂ©quençage de son gĂ©nome en 2015, il fait partie des amibozoaires, un groupe dâunicellulaires un peu primitifs. Mais sa classe a conservĂ© le nom de myxomycĂštes (« champignons gluants »).
Le blob a tout pour exciter la curiositĂ© des biologistes. Il rampe, dĂ©vore tout sur son passage, dispose de 750 types sexuels et peut atteindre la taille de 10 m2 en laboratoire. Bien que dĂ©pourvu de cerveau, il est capable dâapprendre et mĂȘme dâenseigner. Et son comportement varie selon son origine gĂ©ographique ! Si son mode de reproduction ressemble Ă celui des champignons (il disperse ses spores dans la nature), sa façon de se nourrir est typiquement animale : câest un prĂ©dateur qui pratique la phagocytose, câest-Ă -dire quâil engouffre sa nourriture. Mais alors que le champignon ne mange que par absorption de micro-Ă©lĂ©ments, le blob peut ingurgiter des bactĂ©ries, se dĂ©lecte de champignons et, en laboratoire, raffole des flocons dâavoine.
Dans sa façon de manger et de ramper, le blob est proche dâun animal. Mais ses pigments cellulaires jaunes et roses le rapprochent des plantes. MĂȘme son gĂ©nome laisse les gĂ©nĂ©ticiens perplexes. Outre quâils prĂ©sentent de nombreuses caractĂ©ristiques de cellules animales, les gĂšnes de Physarum polycephalum traduisent un organisme dâune complexitĂ© molĂ©culaire inĂ©galĂ©e au sein des unicellulaires.
Exceptionnel, donc, et pourtant dĂ©laissĂ© par la recherche. JusquâĂ ce quâune Ă©quipe japonaise rĂ©vĂšle, dans les annĂ©es 2000, des capacitĂ©s inimaginables pour des ĂȘtres uni cellulaires : prise de dĂ©cision, Ă©valuation des risques, expression de variabilitĂ©s individuelles⊠Les Ă©thologistes ont alors reconsidĂ©rĂ© lâintĂ©rĂȘt du blob.
En testant des souches gĂ©nĂ©tiquement distinctes, on met en Ă©vidence des diffĂ©rences de comportement entre les souches japonaise, amĂ©ricaine et australienne. Ainsi, le blob australien sĂ©crĂšte plus de calcium et en dĂ©tecte des quantitĂ©s infimes dans lâenvironnement, alors que lâamĂ©ricain en sĂ©crĂšte trĂšs peu et le perçoit moins bien. Deux australiens vont lâun vers lâautre, quand deux amĂ©ricains partent chacun dans leur coinâŠ
Au vu de ces compĂ©tences, les scientifiques ont Ă©mis lâhypothĂšse que le blob est capable dâapprendre. Des blobs ont Ă©tĂ© entraĂźnĂ©s Ă ignorer leur rĂ©pulsion naturelle pour la cafĂ©ine, la quinine et le sel, et Ă traverser un pont recouvert de ces substances pour accĂ©der Ă de la nourriture. Ils ont traversĂ© le pont en cinq jours !