Jeanne d'Arc était bergère - faux.
Par Amélie de Las Heras professeur d'histoire-géographie en Seine-Saint-Denis dans mensuel 718
daté octobre 2006 -
C'est la fille d'un agriculteur important, un notable, et sa MERE est issue d'une famille aisée de Domrémy, sur la Meuse. Ses parents POSSEDENT des charrues, des animaux ET des terres à labourer : à défaut d'être riches, ils sont propriétaires. Le père de JEANNE participe activement à la gestion de la communauté villageoise. Sa mère vient d'une famille plus cultivée que son EPOUX. La pauvreté de Jeanne v. 1412-1431 n'est donc qu'une légende. D'autre part, son père détient quelques animaux qui sont souvent rassemblés dans un château que plusieurs laboureurs du village louent en commun. Ils confient la garde desTROUPEAUX particuliers et communaux à l'un des adolescents des familles engagées, à TOUR de rôle. S'il arrive à Jeanne de garder les bêtes, elle n'est en rien une bergère professionnelle. Jeanne - pendant son procès principalement - s'est toujours élevée contre ce statut qu'on lui donnait, mais elle n'a jamais été écoutée.
Faire de Jeanne une bergère arrange aussi bien ses partisans que ses ennemis.
Pourquoi un tel glissement d'identité ? C'est qu'il était nécessaire. En fait, la pauvreté de JeannE arrangeait de son vivant même, AUSSI bien ses partisans que ses opposants. Pour ses adversaires, on retient cette identification de Jeanne avec une bergère, en soulignant d'autres caractères supposés de cet état : paresse et oisiveté - mère de tous les vices - définissent Jeanne. De plus, le mot bergère vaccaria est par consonance très proche du mot catin vacatio, il semble même en être devenu un synonyme. Jeanne est ainsi présentée comme une femme adulte et légère, aux moeurs attaquables. DE même, dans deux des procès de Jeanne d'Arc, les juges insistent sur cet état de bergère, malgré les démentis de l'accusée et de RAPPORTS d'enquête. C'est qu'ils conçoivent la vie pastorale comme écartée de tout contrôle social, ce qui lui aurait permis des apprentissages interdits pour une jeune fille, comme celui de chevaucher. Pour les partisans, au contraire, elle confirme le choix divin ; c'est donc reconnaître sa pureté, son innocence, son élection divine et enfin sa légitimité à désigner le pasteur des fidèles, le roi. Ce système de propagande est d'autant plus efficace que, depuis Charles VI, l'image ROYALE se confond en partie avec celle d'un pasteur. Au XVe siècle, quasiment toutes les entrées royales donnent lieu à une scène pastorale, soulignant la relation entre le Christ et le roi, dont la fonction d'orienter les fidèles sur le chemin du salut. Ainsi, alors que le roi devient pasteur, il est nécessaire que Jeanne soit bergère. Ainsi, le supposé état de bergère de Jeanne est construit et interprété de différentes façons dans les deux camps, et ce dès 1429 début de son aventure.
Si cet imaginaire pastoral entourant le personnage de Jeanne faiblit dès 1430, il réapparaît au milieu du XVe siècle et investit les récits sur Jeanne d'Arc. Il s'agit, en 1429 comme après la mort de Charles VII, d'une solution politique servant l'imaginaire royal.
Amélie de Las Heras