ATTENTION, LA CACHE N’EST PAS SITUÉE AUX COORDONNÉES INDIQUÉES PLUS HAUT.
Néanmoins, ami(e) chasseur de loups-garous, les coordonnées indiquées plus haut constituent le point de départ de votre traque ; En effet, n’espérez pas débusquer une créature démoniaque depuis votre fauteuil ! Non, toute battue ne peut être menée à bien qu’en arpentant le terrain ; Commencez donc par vous rendre à ces coordonnées, puis suivez la piste sanglante laissée par ce « varou » ! Prévoyez un peu de temps sur place : capturer un loup-garou ne se fait pas en cinq minutes !
« LE VAROU »
En Normandie, il se raconte depuis toujours de nombreuses histoires terrifiantes dans lesquelles sévissent des Loups-Garous ; ou plutôt des « Varous » comme le patois local a pris l’habitude de les désigner. En voici une dont j’ai retrouvé par hasard la trace dans un ancien procès-verbal endormi aux archives départementales.
Cette histoire étrange se déroule lors d’un froid crépuscule de janvier 1764.
La nuit tombant, deux enfants, la petite Jeanne et son grand frère Martin, haut de taille, rentraient chez eux à travers les sombres ruelles du village. Aux dires de leurs parents, ces enfants avaient toujours été très sages et ne mentaient jamais ; de véritables petits Saints.
Ainsi, se trouvaient-ils aux abords du cimetière de la pauvre paroisse, devant lequel ils passaient quotidiennement pour regagner leur demeure, lorsque ce soir là, l’inimaginable se produisit ! Comme ils le raconteront plus tard, Jeanne et Martin virent soudainement surgir d’entre les croix dressées, une créature maléfique ; mi-homme mi-loup ; le corps recouvert de longs poils noirs dépassant d’entre les lambeaux de vêtements ; avec une mâchoire déformée et allongée où brillaient des crocs acérés… Un varou !
Immobilisés de terreur ; n’osant plus même respirer, les enfants suivirent l’horrible varou du regard.
Celui-ci, en quelques bonds, sortit du cimetière pour s’arrêter presque aussitôt devant la façade d’une maison. Sur le mur immaculé de la demeure, l’homme-loup, de ces doigts griffus, inscrivit un chiffre ; un chiffre couleur de sang ! Sans nul doute, par ce signe, désignait-il sa prochaine victime !
Alors, humant l’air piquant de l’hiver de ses nasaux fébriles, et après avoir semblé hésiter un instant, le varou se remit en marche, à pas feutrés, en direction des dernières lueurs d’un soleil agonisant.
Malgré l’effroi qui le glaçait, Martin, tirant sa petite sœur par la main, décida de suivre la créature. Ainsi, les deux enfants marchèrent à la suite du varou ; se déplaçant sans un bruit dans une obscurité grandissante.
Ils arrivèrent bientôt aux abords d’un Prévert. Le loup garou s’y tenait immobile, comme hypnotisé par la pleine lune naissance.
Quelques années plus tard, les villageois décideront collégialement de nommer ici une ruelle en mémoire de leur victoire sur cette abomination surgie des enfers. Et, comme pour mieux glorifier leur exploit, ils y inscriront, bien en évidence en hauteur et en lettres noires cerclées de rouge, la taille gigantesque de la créature maléfique qu’ils étaient parvenu à tuer.
Les enfants observaient toujours le loup-garou en silence. Soudain, ayant senti une présence, celui-ci tourna la tête dans leur direction. De surprise, Jeanne ne put retenir un cri d’effroi. La bête, se découvrant observée, bondit et s’enfuit dans l’herbe haute en direction du château seigneurial. En un instant, elle avait disparu.
De retour chez eux, Jeanne et Martin racontèrent cette terrible rencontre à leurs parents, qui, à leur tour, allèrent prévenir le garde-messier.
Aussitôt, une battue fut organisée ; Nul doute que l’immonde bête avait trouvé refuge dans le grand parc entourant le château du village.
Après quelques demi-heures de traque, ce fût un certain Lafosse et son fils qui firent la macabre découverte ; Alors qu’ils étaient postés sur un petit pont enjambant la rivière, ils aperçurent le corps d’un homme écorché qui se « balancier » non loin de là. Le pauvre malheureux, dont toute la peau avait été retirée et dont les muscles à vif rougeoyaient de sang, ne put être identifié. Mais le procès-verbal précisera plus tard que sa taille minimale devait être de 1m40.
Horrifiés et furieux, les villageois intensifièrent leur chasse.
Bientôt, le hurlement d’une corne de chasse indiqua que la bête avait été localisée. Puis, après plusieurs minutes terribles d’une lutte effroyable où beaucoup furent blessés, le loup garou finit par être capturé.
Le seigneur du village, qui commandait la battue, rendit prestement justice afin de soulager ses sujets terrorisés devant les œuvres du Diable ; Sans tarder, il désigna un arbre dans le parc, un arbre particulier, moitié d’ici et moitié de contrées lointaines puisque que la créature avait été moitié loup et moitié homme ; On y accrocha aussitôt une corde et le varou y fut pendu en punition de ses crimes.
Une fois raide et sans vie, la dépouille du démon fut décrochée ; On devait la porter en terre au plus vite pour prévenir tout retour du Mal. Certes, mais il fallait surtout que son tombeau resta secret pour que nul ensorceleur ou nul nécromant ne vienne y puiser maléfices.
Le procès-verbal ne précise pas l’endroit qui fut choisi – même si, de toute évidence, le monstre a été enterré quelque part dans le parc – mais il s’achève par un passage des plus obscurs que je recopie ici fidèlement pour vous :
« Au pied d’un des GLSCAURNOMRKWICE repose icelui funeste animal.
Pour savoir :
Chiffre de sang, Taille du varou, Année au pied de l’arbre, Année de l’écorché, Nombre lié au hameau du sieur Lafosse, tous à la suite disposés.
Chaque chiffre, de sa valeur, avance chaque lettre.
»
Voilà.
Quel crédit apporter à toute cette histoire ? Je ne sais.
Mais, à moins de retrouver un jour l’antique tombeau de ce varou, le mystère restera entier…
J.L. Talcenhollt