Les casernes de souvenir.
J'ai vu Joppet sortir de terre
Nous avons emménagé ici en 1996.
Il n'y avait pas de parking, pas de jardin, pas de gymnase, et encore des lapins de garenne !
De ma fenêtre, je voyais le poteau dressé sur la grande place où avait lieu la levée des couleurs.
Au fil des années, j'ai vu cette ZAC prendre forme, de nouveaux immeubles ont été bâtis.
Il me semble qu'il y a là une bonne représentation des différentes strates sociales, même si les classes moyennes sont les plus nombreuses.
J'aime vivre ici, pour l'ambiance, vivante, et la proximité du centre-ville, où l'on peut se rendre à pied en suivant un itinéraire agréable.
C'est un endroit où l'on a envie de prendre racine. »
Il paraît que, lorsque la garnison vivait encore à Chambéry, elle imprimait son rythme à toute la ville:
«Pas de cérémonie, pas de fête sans parade ni défilé des troupes. Au petit matin, elles traversaient la ville pour se rendre au Champ-de-Mars; le soir, les hôtesses s'arrachaient les officiers pour les dîners mondains.»
En ce temps-là, de 1820, où la ville accueille régulièrement un régiment de cavalerie, jusqu'au début du xxe siècle, lorsque la réorganisation de l'armée voit décliner les effectifs, les militaires sont rois à Chambéry.
Après avoir longtemps logé chez l'habitant seules les familles avec une mère en couches et les jeunes filles étaient dispensées de cet accueil forcé, ils disposent désormais de trois casernes établies dans d'anciens couvents.
Aux Ursulines, en 1802, on construit Curial, dédiée à l'infanterie et bâtie selon le plan carré des Invalides - 100 mètres sur 100 bordés de portiques; en 1816, Barbot (pour la cavalerie) prend place sur les terrains de l'ancien couvent Sainte Marie l'Egyptienne; enfin, en 1888, le treizième Bataillon de Chasseurs Alpins (B.C.A.), nouvellement créé, prend ses quartiers à Joppet.
«A l'époque, c'était la périphérie de la ville, précise le général Venet, adjoint au maire et ancien de Joppet. Il y avait des prés de chaque côté de la route...»
Difficile d'imaginer à quoi ressemblait ce lieu, aujourd'hui transformé en ZAC, que la municipalité racheta en 1989, lorsque le ministère de la Défense décida de transférer le 13e BCA à Roc-Noir.
Mené au pas de charge, ce projet sera achevé en 2008 et comptera 661 logements, rassemblés autour du gymnase La Palestre-Jacques-Lapeyre et d'un grand jardin qui résonne déjà des cris des enfants.
Pour l'ensemble Barbot-Curial, abandonné par l'armée au milieu des années 1970, les choses se sont déroulées bien différemment.
Situées en centre-ville, les deux casernes furent l'objet d'intenses négociations entre la municipalité et les trois associations de défense du patrimoine.
«Pierre Dumas, le maire [UNR], voulait tout raser. Il avait décidé de construire des immeubles avec l'illusion qu'on allait en faire le coeur de Chambéry! Comme si l'on pouvait déplacer un centre...»
Réunions d'habitants, négociations, meetings à n'en plus finir... Malgré l'énergie déployée par ses défenseurs, qui mettent en avant l'architecture exceptionnelle des lieux, la municipalité décide de démolir Barbot.
«Vous savez, c'était du donnant-donnant, témoigne un acteur de ce combat. En substance, on nous disait: soit vous nous laissez les casernes, soit on ceinture le centre ancien de constructions ultramodernes... Il a bien fallu céder.»
Barbot a été détruite - à sa place s'élève la maison de la culture André-Malraux, dessinée par Mario Botta; Curial, fraîchement rénovée, est reconvertie en centre administratif, commercial et culturel avec, pour phare, une superbe médiathèque installée sur plusieurs niveaux. Mais le Carré Curial, cette cour où l'on sonnait jadis le clairon, reste désespérément vide. Une grande étendue de sable, quelques jeux pour enfants...
L'ancienne caserne napoléonienne, autrefois protégée par de hauts murs de clôture, garde toujours les Chambériens à distance.
L’Express. Par Mylène Sultan le 06/12/2007
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