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QU'EST-CE QU'UN SEISME ?
Un séisme ou tremblement de terre est une secousse du sol résultant de la libération brusque d'énergie accumulée par les contraintes exercées sur les roches. Cette libération d'énergie se fait par rupture le long d'une faille, généralement préexistante.
Plus rares sont les séismes dus à l'activité volcanique ou d'origine artificielle (explosions par exemple). Le lieu de la rupture des roches en profondeur se nomme le foyer (ou hypocentre), et la projection du foyer à la surface est l'épicentre du séisme. Le mouvement des roches près du foyer engendre des vibrations élastiques qui se propagent, sous la forme de trains d'ondes sismiques, autour et au travers du globe terrestre, qui diminuent avec la distance au foyer. Il produit aussi un dégagement de chaleur par frottement, au point de parfois fondre les roches le long de la faille.
Il se produit de très nombreux séismes tous les jours mais la plupart ne sont pas ressentis par les humains. Environ cent mille séismes sont enregistrés chaque année sur la planète. Les plus puissants d'entre eux comptent parmi les catastrophes naturelles les plus destructrices. La grande majorité des séismes se produisent à la limite entre les plaques tectoniques (séismes interplaques) de la terre, mais il peut aussi y avoir des séismes à l'intérieur des plaques (séismes intraplaques).
La science qui étudie ces phénomènes est la sismologie et l'instrument de mesure principal est le sismographe. L'acquisition et l'enregistrement du signal s'obtiennent dans une station sismique regroupant, outre les capteurs eux-mêmes, des enregistreurs, numériseurs et antennes GPS, pour le positionnement géographique et le temps.
L'hypocentre ou foyer sismique peut se trouver entre la surface et jusqu'à sept cents kilomètres de profondeur (limite du manteau supérieur) pour les événements les plus profonds.
Les séismes tectoniques, dont fait partie le séisme de 1909, sont de loin les plus fréquents et dévastateurs. Une grande partie des séismes tectoniques a lieu aux limites des plaques, où se produit un glissement entre deux milieux rocheux. Ce glissement, localisé sur une ou plusieurs failles, est bloqué durant les périodes inter-sismiques (entre les séismes), et l'énergie s'accumule par la déformation élastique des roches. Cette énergie et le glissement sont brusquement relâchés lors des séismes.
Le relâchement de l'énergie accumulée ne se fait généralement pas en une seule secousse, et il peut se produire plusieurs réajustements avant de retrouver une configuration stable. Ainsi, on constate des répliques à la suite de la secousse principale d'un séisme, d'amplitude décroissante, et sur une durée allant de quelques minutes à plus d'un an.
Ces secousses secondaires sont parfois plus dévastatrices que la secousse principale, car elles peuvent faire s'écrouler des bâtiments qui n'avaient été qu'endommagés, alors que les secours sont à l'œuvre. Il peut aussi se produire une réplique plus puissante encore que la secousse principale quelle que soit sa magnitude.
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L'ECHELLE DE RICHTER
La puissance d'un tremblement de terre peut être quantifiée par sa magnitude, notion introduite en 1935 par le sismologue Charles Francis Richter. La magnitude se calcule à partir des différents types d'ondes sismiques en tenant compte de paramètres comme la distance à l'épicentre, la profondeur de l'hypocentre, la fréquence du signal, le type de sismographe utilisé, etc. La magnitude est une fonction continue logarithmique : lorsque l'amplitude des ondes sismiques est multipliée par 10, la magnitude augmente d'une unité. Ainsi, un séisme de magnitude 7 provoquera une amplitude dix fois plus importante qu'un événement de magnitude 6, cent fois plus importante qu'un de magnitude 5.
L'échelle étant le logarithme d'une amplitude, elle est ouverte et sans limite supérieure. Dans la pratique, les séismes de magnitude 9,0 sont exceptionnels et les effets des magnitudes supérieures ne sont plus décrits séparément. Le séisme le plus puissant mesuré, atteignant la valeur de 9,5, fut celui de 1960 au Chili.
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LE SEISME PROVENCAL DE 1909
Le séisme de 1909 en France, aussi appelé séisme de Lambesc, fait référence à un séisme de magnitude 6,2 sur l'échelle de Richter qui s'est produit dans le Sud-Est de la France et qui entraîna d'importants dégâts et destructions au sein des villes de Salon-de-Provence, Vernègues, Lambesc, Saint-Cannat, Rognes dans le massif de la Trévaresse en Provence (Bouches-du-Rhône) et Montpellier dans l'Hérault. C'est le tremblement de terre de magnitude la plus élevée enregistré en France métropolitaine depuis celui de Roquebillière le 20 juillet 1564. Il fut ressenti dans tout le Sud de la France et en Italie, de Gênes à Perpignan.
Le bilan humain fait état de 46 morts et 250 blessés. L'ampleur des dégâts matériels fut considérable puisque 3 000 constructions furent endommagées et ce pour un coût total de 2,2 milliards de francs.
L'origine de ce tremblement de terre se trouve dans le rapprochement de la plaque africaine (plus précisément de la plaque adriatique) en direction de la plaque eurasienne au nord et qui a pour conséquence le plissement de la croûte terrestre, à l'origine de l'érection des Alpes, et la formation de failles engendrant les séismes.
Depuis, aucune activité de forte ampleur n'a été observée. Classée en zone II, puis en zone 4 dans le zonage de 2011, soit à sismicité moyenne, cette région doit respecter les règles de construction parasismique.
Plusieurs secousses préliminaires se produisent à divers endroits de Provence : le 26 mai 1909, au Puy-Sainte-Réparade et le 28 à Saint-Cannat. Peu avant la secousse principale, le 11 juin, on remarque le comportement anormal d'oiseaux volant bas, avec des cris de frayeur, de chiens hurlant à la mort, et de chevaux piaffant.
Le 11 juin 1909, à 21h15, deux secousses très violentes ébranlent la Basse-Provence, et, plus particulièrement, l'est du département des Bouches-du-Rhône. La profondeur du tremblement de terre est évaluée à 10 kilomètres (Il s'agit là d'un séisme superficiel).
Le 14 juin, on fait état d'un bilan de 43 morts. Le 15 juin, le sous-secrétaire d'État au ministère de l'Intérieur, M. Mauzan, sous les ordres du ministre Clemenceau, visite les villages détruits.
Le 16 juin, le bilan est porté à 46 morts et plusieurs centaines de blessés. On évalue les dégâts, le 19 juin, à 15,5 millions de francs, dont 4,6 millions à Salon-de-Provence, 2 millions à Saint-Cannat et 1,55 million à Rognes.
Dans les semaines suivantes, des répliques, parfois violentes, surviennent, jetant l'effroi parmi la population : le 10 juillet, à Meyrargues, les 12, 13, 14 et 16 juillet à Puyricard, Arles, Lambesc, Marseille et Toulon.
La population, sous le choc, craint la violence des répliques et passe ses nuits à la belle étoile, sur les places ou dans les jardins publics, dans la crainte de l'effondrement de bâtiments. Ainsi, à Aix-en-Provence, « la place des Prêcheurs se remplit de gens dormant sur des matelas ».
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CONTEXTE GEOLOGIQUE ET TECTONIQUE DU SEISME DE 1909
Le contexte géologique et tectonique de cette partie de la Provence est relativement simple. La région est constituée de terrains mésozoïques ayant subi l'orogenèse pyrénéo-provençale (raccourcissement N-S avec formation de plis E-O, accompagnés de chevauchements, avec un maximum des déformations à l'Eocène). L'ensemble est recouvert en discordance par des terrains continentaux et marins de l'Oligocène et du Miocène. Ces terrains sont eux-mêmes impliqués dans une tectonique plicative et/ou chevauchante modérée mais réelle ; par exemple, les célèbres chaînons du Lubéron chevauchent le Miocène situé juste au Sud.
La géologie des environs du séisme telle que la représente les cartes géologiques 1/50.000 du BRGM (Salon de Provence et Pertuis) est assez simple : terrains oligocènes et miocènes relativement peu déformés présentant des pendages non nuls (mais faibles, et non indiqués sur les cartes géologiques, et localement forts au voisinage des failles) en discordance sur le Mésozoïque.
La seule faille cartée notable (susceptible d'être à l'origine du séisme de 1909) est connue sous le nom de la faille de la Trévaresse, au Sud du chaînon du même nom, faille qui met en contact de l'Oligocène (au Nord) et du Miocène (au Sud). Observer ou localiser en détail cette faille est difficile en raison des mauvaises conditions d'affleurement. Cette faille correspond à un dénivelé ; mais ce dénivelé topographique pourrait correspondre autant à une érosion différentielle plus faible au Nord (calcaire) qu'au Sud (sables et marnes) qu'à la manifestation de mouvements récents. La preuve de la difficulté de la localisation précise de cette faille est la non-continuité des tracés de la faille dessinés à la limite des cartes 1/50.000 de Salon de Provence et du Pertuis.
A LA RECHERCHE DE LA FAILLE ACTIVE RESPONSABLE DU SEISME DE 1909
Les sismologues de l'époque n'ont pas décrit de mouvements traduisant le jeu superficiel d'une faille. Aucun nouveau petit escarpement ou miroir visible n'ont été identifiés.
Les témoignages de l'époque montrent que (1) soit de tels mouvements superficiels n'ont pas eu lieu et que les mouvements à l'origine du séisme de 1909 n'ont eu lieu qu'en profondeur, (2) soit ces mouvements superficiels étaient trop faibles et avaient eu lieu dans des sites trop peu accessibles pour avoir été repérés à l'époque. Il est à noter que la nouvelle ligne du TGV Méditerranée passe à 4 km à l'Ouest de Lambesc. Les mesures ultra-précises de nivellement faites à cette occasion permettront de bien localiser la faille après son futur rejeu.
En l'absence de manifestation de surface, savoir quelle faille a joué lors du séisme de 1909, en particulier si c'était la faille de la Trévaresse ou une autre faille moins visible, a été un véritable "jeu de piste".
1er Indice : la forme allongée des isoséistes
Les isoséistes sont des courbes d'égale intensité sismique. Les chercheurs déterminent d'abord l'intensité du séisme en différents lieux d'après les dégâts qu'ils observent et les témoignages qu'ils recueillent. Les valeurs obtenues sont ensuite reportées sur une carte. Les zones de même valeur sont délimitées par des courbes : les isoséistes.
Les isoséistes délimitent des zones allongées, orientées ONO-ESE, ce qui suggère que la faille responsable du séisme ait cette orientation. Or, cette orientation est celle de la faille de la Trévaresse.
2ème Indice : une rupture de pente et un "scarplet" dans la zone de la faille de la Trévaresse
Les lignes isoséistes entourent la chaîne de la Trévaresse, bombement anticlinal post-Miocène long de 15 km. Une pente raide, haute de plusieurs dizaines de mètres, marque le flanc Sud de ce pli. À sa base, un escarpement plus raide, avec, localement une "marche d'escalier" fraîche (un scarplet frais) faisant face au Sud, pourrait correspondre à l'émergence en surface de ruptures co-sismiques successives. La dernière de ces ruptures aurait pu se produire en 1909 mais aurait été trop faible pour être remarquée par les observateurs de l'époque. L'ensemble de ces données morphologiques permettent de proposer que le séisme de 1909 ait réactivé une faille à pendage Nord située sous l'anticlinal de la Trévaresse, au voisinage du tracé cartographique de la Faille de la Trévaresse.
3ème Indice et quasi-preuve : les études en tranchées paléo-sismologiques
Quand aucun affleurement naturel ne permet d'étudier en détail ce qui se passe sur le tracé d'une faille (ou d'une supposée faille), on effectue une ou des tranchées qui permettent d'identifier des petits décalages de terrains masqués par le sol, de remarquer des variations d'épaisseurs de sédiments (ou d'éboulis) montrant un jeu syn-sédimentaire de la faille, de trouver des niveaux "datables" (par exemple des paléosols riches en matière organique datables par la méthode 14C) pour estimer des vitesses moyennes des déformations...
Les études précédant le creusement de la tranchée ne doivent pas se contenter d'étudier quelques mètres de part et d'autre de la faille majeure supposée, car souvent des failles annexes se « greffent » sur la faille majeure et peuvent affleurer à quelques dizaines ou centaines de mètres de la faille principale. Après des études poussées de topographie, géophysique… de détail, les équipes de sismologie de Marseille et de Grenoble (coordonnées par Dominique Chardon, du CEREGE ont proposé que deux failles annexes se raccordent à la branche principale de la faille de la Trévaresse, et que c'était l'une d'elle (Faille EF) qui avait probablement rejoué lors des séismes les plus récents, dont celui de 1909. Ils ont fait effectuer une tranchée perpendiculaire au tracé supposé de la "faille EF", située à 400 m au Nord de la branche principale de faille de la Trévaresse. Cette tranchée de 50 m de long permet de voir que cette "faille EF" correspond en fait à quatres mini-failles. Et dans trois ce ces quatre mini-failles, des terrains d'âge tortonien (Miocène supérieur datant de –11 à –6 Ma) chevauchent des terrains datant du Quaternaire récent (cône alluvial). Le secteur de la faille de la Trévaresse est bien une zone de faille active !
SYNTHESE
La figure suivante résume la géologie de l'Ouest provençal, et en particulier localise les chevauchements actifs (ou récents), les axes anticlinaux actifs (ou récents), le paléo-tracé de la Durance, l'épicentre du séisme de 1909... Cette figure montre aussi une coupe N-S à travers la faille de la Trévaresse, coupe qui propose que cette faille active soit une émergence de rampe. Selon cette interprétation, la surface de glissement basal de la rampe avant l'émergence correspondrait soit au Trias supérieur, soit au Crétacé basal.
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Autres sources
LE VIEUX VERNEGUES
Dans cette tragédie, intéressons-nous plus particulièrement au vieux village de Vernègues, ou du moins ce qu'il en reste.
Avant sa destruction, le vieux village se trouvait sur la pointe SE du plateau du Grand Puech.
Point de départ de l’histoire de Vernègues, le plateau du Grand Puech est un vaste espace dégagé qui domine la vallée de la Durance. Il fut le lieu privilégié de l’occupation humaine depuis l’époque néolithique. La nécropole rupestre de Saint Saëns et Saint Abdon, au Nord-Ouest du Grand Puech, est aujourd'hui le plus ancien témoignage du début du Moyen Âge à Vernègues.
La table d’orientation installée sur l’ancien moulin offre une vue panoramique allant de la Montagne Ste Victoire jusqu’à l’Etang de Berre.
Du point de vu sédimentologique, ce grand plateau est coiffé par un des rares pointements de Tortonien marin (7 à 12 millions d'années), une formation d'une vingtaine de mètres d'épaisseur de biocalcarénite (roche constituée de sables calacires coquillers, à grains supérieurs à 2 mm) à texture vacuolaire, rousse en surface, mais gris verdâtre en profondeur, là où la roche est saine. On y observe une stratification oblique et entrecroisée, et l'accumulation de nombreux fragments de coquillages, ce qui témoigne à l'époque d'un environnement littoral peu profond, agité par les courants, sous climat chaud.
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Comme ici, on retrouve ce type roche en position dominante aux Baux-de-Provence, avec un calcaire coquiller un peu plus ancien (Burdigalien - 16 à 20 millions d'années). Egalement, cette roche est exploitée à Rognes, comme pierre de taille.
Du point de vu tectonique, toute la région est traversée par un train de failles de direction globalement SO-NE (ci-dessous), et certaines d'entre elles délimitent le plateau du Grand Puech, avec une zone de fragilité au droit du château de Vernègues.
Bien qu'aucun mouvement lié à ces failles n'ait été constaté suite au séisme, la terre a tremblé et les constructions se sont écroulées. Et le château était en première ligne.
On constatera l'effondrement du château, et la destruction de la quasi-totalité des maisons, entrainant deux morts. Le village a depuis été rebâti plus bas.