Châteauvillain
Chapelle de la Trinité
À Châteauvillain, un Chapitre de chanoines fut fondé, en
1260, par Jean Ter sire de Châteauvillain, dans la chapelle Saint-
Jean-Baptiste du château. L'église Saint-Berchaire fut fondée au
12ème siècle, près du château, par les bénédictins du prieuré de
Marmesse et n’en était alors qu’une simple succursale. Elle fut
remise au Chapitre en 1267, donation ratifiée la même année par
le pape Urbain IV. Dès lors, elle devint église paroissiale et
collégiale. Le Chapitre fut aboli en 1790 et la collégiale démolie en
1791. Il n’en reste qu’un pan de mur avec une fenêtre haute,
ogive en lancette, visible de la rue des Récollets.
Dès le 13ème siècle, comme de nombreuses villes,
Châteauvillain avait un hospice, hors de la cité fortifiée, pour
accueillir les lépreux. Cette léproserie (lazaret, ladrerie,
maladrerie ou maladière) se situait à l’ouest de la ville, bien
au dehors (aujourd’hui entre l’Aujon et la voie ferrée). La
lèpre se raréfiant, les bâtiments ainsi que la chapelle et son
enclos tombèrent en ruines.
C’est alors, en 1604, qu’un enfant du pays, "savant
docteur en théologie et chanoine de la Collégiale" Saint-
Berchaire, Joachim Forgemont (1547-1620), "fit construire
en cet endroit une chapelle sous l'invocation de la Sainte
Trinité dans laquelle on célébrait la messe tous les
dimanches". Toujours bien visibles, ses armes (cinq burèles
accompagnées en chef de trois croix) sont gravées, à
l’intérieur, sur la clé de voûte à quatre caissons de l’unique
travée, et extérieurement, sur une pierre au-dessus de la
porte d'entrée avec quelques ajouts dont une date : 1604.
Avec son enclos - sans doute autrefois cimetière -
cette chapelle fut attribuée en 1695, par Louis XIV, à
l’hôpital de Bar-sur-Aube ; puis, après la Révolution, à
l’hospice de Châteauvillain qui l’a cédée, en 1980, à la
commune. Malgré ses quatre siècles d’ancienneté, cet édifice
a toujours conservé extérieurement (et aussi intérieurement)
son aspect originel, avec son porche, ses six contreforts, sa
couverture en laves, son campanile et son chevet plat avec
une unique fenêtre en plein cintre pour donner de la clarté
au lieu.
Une importante restauration, réalisée entre septembre
2010 et juin 2011, lui a rendu son éclat originel, une nouvelle
jeunesse par "les mains habiles d'un maçon, tailleur et
poseur de laves".
Un appel à souscriptions a même permis de Redonner
une voix au clocheton. Le jeudi 2 juin 2011, cette cloche a été
baptisée "Élisabeth Émilie" par Mgr Philippe Gueneley,
évêque de Langres. « Pour moi, a-t-il exprimé, c'est un
événement exceptionnel qui permet un véritable
rassemblement à la fois de citoyens et de croyants. La cloche
symbolise l'outil qui permet de se réunir. »
Une remarque à propos de la primitive cloche
"disparue" : ce n’est pas elle qui se trouve dans le clocher de
la basilique Saint-Jean-Baptiste de Chaumont. Léon Godard,
dans un ouvrage paru en 1848, "Histoire et tableau de
l’église Saint-Jean-Baptiste de Chaumont", mentionne déjà
(page 173) les cinq cloches de cette église, « trois de moyenne
grosseur et deux petites ». Et, pour chacune, il en fait la
description. Une seule vient de Châteauvillain : « La seconde,
au couchant, vient de l’église Saint-Berchaire de
Châteauvillain. Elle porte le sceau du Chapitre de cette ville.
Ses ornements sont de fleurs-de-lys et une grande croix
fleurdelysée. » Et l’inscription le confirme : « I H S, Maria ;
Sancte Joannes evangelista ora pro nobis. Pour parrain
Nicolas de l’Hospital, marquis de Vitry et pour mareine
Madame Françoise Marie Pot de Rhodes, femme de haut et
puissant seigneur Me François Marie de l’Hospital, duc de
Vitry l’an 1652. – M. Martin Rolin m’a faicte. » Elle fait 139 cm
de hauteur et 137 cm de diamètre. En fait, elle fut
descendue du clocher de Saint-Berchaire en 1793 en vue
d'être fondue, elle réchappa à ce destin et fut montée dans le
clocher sud de la basilique.
Le comté de Châteauvillain fut acheté, en 1623, par Nicolas
de l'Hospital, duc de Vitry et maréchal de France, et fut réuni en
1650 au marquisat d'Arc, autre possession familiale, pour être
érigé en duché-pairie de Vitry. Né en 1581, Nicolas de l'Hospital
meurt le 28 septembre 1644 à Nandy près de Melun. La marraine
est l'épouse de son fils, François-Marie. Cette cloche semble être la
seule réalisation connue de Martin Rollin, fondeur de cloches
originaire de La Mothe.
Depuis le 17 mai 1974, la chapelle de la Trinité est inscrite à l’inventaire
supplémentaire des Monuments historiques. À juste titre. Car, même dégradée, sa
richesse intérieure est bien plus merveilleuse.
Source : Henri DEGRUTÈRE