La Vieille Alliance

Datant de 1295, la Vieille Alliance fut conclue entre l'Ecosse et la France, les deux pays ayant comme intérêt commun de contrôler les projets agressifs d'expansion de l'Angleterre. Signé par le roi d'Ecosse John Balliol et Philippe IV de France, ce traité était d'abord et avant tout une alliance militaire et diplomatique, mais pour le peuple écossais, il a apporté des avantages plus concrets grâce à des emplois comme mercenaires dans les armées de la France et bien sûr, un approvisionnement régulier en vins français les plus raffinés.
La bataille d'Azincourt
La victoire de Henry V à la bataille d'Azincourt en 1415 fut l'un des plus grands exploits militaires de l'Angleterre. Pour les Français, cela a été un désastre d'une telle ampleur qu'il a conduit à la quasi-faillite du pays. En désespoir de cause le Dauphin français s'est tourné vers les Ecossais, ennemi traditionnel de l'Angleterre, pour l'aider. Comme toujours impatients à l'idée d'un combat contre leur vieil ennemi, plus de 12.000 écossais sont montés à bord de bateaux en partance pour la France. Et ils n'ont pas eu à attendre trop longtemps : en 1421 à la bataille de Baugé ils ont défait l'armée anglaise, tuant le duc de Clarence.
L'armée écossaise en fut bien récompensée par ses alliés français avec des honneurs, des titres et la fourniture de victuailles et boissons en abondance. Cette vie faste et plantureuse semble avoir pris fin, au Verneuil en 1424 lorsqu'une armée écossaise de 4.000 hommes fut complètement anéantie. En tant que mercenaires ils ne pouvaient s'attendre à aucune pitié et ils en subirent le châtiment : tous ont été passés au fil de l'épée.
Malgré cette défaite, l'intervention militaire des Ecossais avait fourni un répit précieux, qui retarda finalement la mainmise anglaise sur la France.
De nombreux écossais sont ensuite restés en France. Certains ont rejoint Jeanne d'Arc dans son célèbre combat au secours d'Orléans. D'autres ont formé la Garde Ecossaise, corps personnel et loyal de protection des rois de France. Comme permis par les conditions de l'Alliance, de nombreux mercenaires se sont établis en France, bien que les immigrants qu'ils étaient se considéraient toujours d'abord comme des Ecossais.
Comme précisé plus haut, la Vieille Alliance n'était pas seulement militaire, mais aussi une alliance commerciale basée sur l'amour des Ecossais pour le vin ... vin français spécialement !
Grâce à cette relation particulière, les marchands écossais ont eu le privilège de sélectionner les meilleurs vins pour eux-mêmes, au grand dam des amateurs de vin du sud du pays. Ce vin, débarqué en barriques dans les ports comme Leith, était principalement consommé par l'élite de la société écossaise, alors que la plupart des roturiers continuaient de boire du whisky ou de la bière.
La Vieille Alliance a cependant été ébranlée par la Réforme, et le commerce entre Ecosse protestante et France catholique ne devenait évidemment plus possible ... ou plus voulu ?
Il semble que la Réforme ait affecté sensiblement le commerce du vin entre les deux pays, à la seule exception du bordeaux. Les Ecossais ne pouvant apparemment pas s'en passer.
Les dossiers montrent que les marchands écossais étaient toujours en affaire à Bordeaux afin d'importer leurs vins préférés jusqu'en 1670. Même après l'Union des Parlements avec l'Angleterre en 1707, le bordeaux continue à être introduit en Ecosse, clandestinement pour éviter les taxes. Il semble que les écossais de tous temps ont cherché à démontrer leur affinité avec leurs amis français en portant des toasts "the King over the water" avec une bonne goutte de rouge de bordeaux.
L'alliance originale qui a accordé la double nationalité dans les deux pays a finalement été révoquée par le gouvernement français en 1903.