C 'est en écoutant cette histoire qu'il s'est endormi !
Pierre possédait deux champs. Mais, faute de bras, il ne cultivait qu’un seul champs. De plus, le second était couvert de pierres. Chaque jour, il regardait son champ et les forces lui manquaient pour retirer ces pierres.
Un matin, pourtant il dit à sa femme : « Et bien aujourd’hui, la Marie, j’ai décidé qu’on allait s’occuper de notre champ de pierres! » Les voilà partis à retirer les pierres. Mais, après quelques heures, les bras se firent lourds et les forces commençaient à disparaître. Surtout quand ils virent ce qu'il restait à faire ! « Eh, la Marie, je crois que ce n’est pas encore aujourd’hui que nous allons nettoyer ce champ. »
Ce qu'ils n’avaient pas vu, c’était qu’une colonie de Korrigans passait dans le fond du champ. Remarquez, ce n’est pas étonnant car un korrigan est haut comme trois pommes. Et du champ, il est difficile de les voir ! Donc, une colonie de korrigans passait par là. Imaginez cinq cent korrigans avancer en file indienne! Le chef des korrigans surprit la conversation de Pierre et de sa Marie, et voulut les aider.
Mais comment arrêter une colonie de korrigans d’un seul coup ! Sans que l’on assiste à une cascade de dominos… euh non, de korrigans! Et bien, il y a le Code ! Quel code ? Le Code de conduite de colonie de korrigans, que chaque korrigan doit connaître ! Le chef des korrigans lève la main droite, ce qui signifie : STOP. Le deuxième fait le même signe, suivi du troisième, du quatrième et ainsi de suite jusqu’au dernier. Le chef des korrigans saute en faisant un demi-tour et enchaine des gestes pour expliquer son idée d’aider Pierre. Le deuxième Korrigan se retourne lui aussi et passe le message au troisième qui le passe au quatrième, et ainsi de suite jusqu’au dernier. Si le korrigan est d’accord, il lui suffit de lever la main gauche. Ce que firent bien sûr, tous les korrigans.
Et nos cinq cent korrigans formèrent une chaine pour se passer les pierres de mains en mains. Quelle ne fut pas la surprise de Pierre et de Marie de voir se vider en un clin d’ oeil leur champ de ses pierres !!! Surtout quand on ne voit pas ceux qui vident le champ! Quand tout fut fini, le chef des korrigans vint se poster devant Pierre et Marie, les salua bien bas, geste aussitôt repris par tous les korrigans. Pierre leur rendit leur salut, et dit : « On ne peut pas vous laisser partir comme ça! Vous avez trop bien travailler, vous devez être affamés. La Marie, il va falloir restaurer ces petits! » . Ainsi, les cinq cents korrigans les suivirent jusqu’à leur modeste demeure. »
Mais, dit la Marie, comment vais-je faire pour nourrir tout ce petit monde? Je ne vais jamais avoir le temps de couper tous mes légumes avant l’heure du souper! » Le chef des korrigans se tourna vers ses compagnons et après une série de gestes incompréhensibles , ils firent plusieurs colonnes. Marie comprit et fournit à chaque colonne couteaux et légumes à éplucher. Et en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire, tous les légumes furent prêts. Marie mit à chauffer de l’eau et y mit pommes de terre, carottes, navets, pois de… Ah c’est vrai la soupe de Marie, c’est un secret! Si vous saviez comme elle est bonne ! Quand la soupe fut prête, les korrigans s’alignèrent et sortirent de leur poche une écuelle et une cuillère en bois. Car tout korrigan qui se respecte, ne sort jamais sans son écuelle et sa cuillère de bois! Marie se mit à les servir. Une fois ce petit monde repu, les korrigans repartirent.
Pierre et Marie étaient très heureux et décidèrent qu'ils se mettraient au travail dans leur nouveau champ dés le lendemain. Les korrigans étaient épuisés de cette journée de travail.
Et quand leurs épouses korrigans les appelèrent pour diner, quelle ne fut pas leur surprise quand leurs maris répondirent qu’ils avaient déjà mangé et qu’ils étaient fatigués !!! Ces mesdames korrigans ne dirent rien mais furent très vexées! Le lendemain, Pierre et Marie arrivèrent dans leur nouveau champ pour retourner la terre. Mais voilà, ils ne s’étaient jamais rendu compte à quel point leur champ était grand! « Oh là là, la Marie, comment allons nous pouvoir retourner la terre, semer et aller s’occuper de l’autre champ! » Nos amis manquèrent de courage!
Mais les korrigans passaient par là! Et comme la veille, notre chef korrigan leva la main droite, ce que fit également le deuxième korrigan, puis le troisième et ainsi de suite jusqu’au dernier! Tous levèrent la main en signe d’accord et partirent se mettre au travail. Et en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire, le champ fut retourné et les graines semées. Le couple assista ébahi au spectacle. Comme la veille, Pierre décida de les récompenser et comme la veille, les korrigans aidèrent Marie à préparer sa délicieuse soupe. Marie mit de nouveau dans sa marmite, pommes de terre, carottes, navets, pois chiches, haricots verts… Ah mais pour le reste, c’est un secret! Elle servit nos amis dans leur écuelle en bois, ils rentrèrent repus.
Et une fois de plus, ils refusèrent quand leurs épouses les conviaient à table. Le lendemain, ça parlait entre femmes de Korrigans : »Toi, non plus, il n’a pas souper!!! », « Je ne vois pas ce que ma soupe avait, elle était comme d’habitude!!! », « Il doit être malade!!! », …
Les saisons passèrent et vint le temps de la récolte. Comme les fois précédentes, les korrigans étaient là pour aider Pierre. Et en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire, tous les légumes furent ramassés. Comme de coutume, maintenant, Marie prépara sa bonne soupe secrète. Tous les korrigans mangèrent la bonne soupe. De retour chez eux, aucun ne mangea et là, c’en était trop pour mesdames Korrigans! Et un grand cri de colère sortit presque à l’unisson du village Korrigan : »Qu’est-ce qu’elle a ma soupe ??? » Les korrigans durent avouer à leurs femmes la raison de ce manque d’appétit.
L’hiver arriva. Tout était calme dans le village des Korrigans. Plus de travail dans les champs, donc plus de bonne soupe secrète de Marie. Quand revint le printemps, notre colonie de korrigans reprit le chemin du champ de Pierre. Et là, quel ne fut pas leur surprise de voir le champ abandonné. Les jours passaient et toujours pas de Pierre et Marie !!! Que se passe-t-il? Il fallait savoir. Les Korrigans prirent le chemin de la maison de Pierre et Marie. Rien ne bougeait. Il formèrent alors une colonne pour voir par la fenêtre et là, quelle surprise de voir Pierre allongé dans son lit et Marie qui pleurait à côté. Pierre était malade!
Il fallait faire quelque chose. Tous les korrigans de Bretagne se passèrent le mot. Il fallait trouver un remède puisque les médecins humains ne trouvaient pas!!! Les sorciers korrigans firent la queue devant chez Pierre pour le soigner. Les uns après les autres, ils lui administrèrent leurs breuvages. Mais, rien, rien ne pouvait guérir Pierre. Et un jour, Pierre mourut.
Les korrigans furent inconsolables. Ils pleurèrent toute la nuit. Des millions de korrigans de toute la Bretagne versèrent des larmes qui se transformèrent en rivière, et en fleuve, et en lacs. Voilà, comment en une nuit, les rivières, fleuves et lacs de Bretagne apparurent.
Certains vous diront que ces rivières, fleuves et lacs sont là depuis des milliers d’années. Mais, je vous le dis de source korrigane, regardez cette eau et sachez que ce sont des larmes de korrigans pour leur grand ami Pierre.
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