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Si les moissons 2023 ont Ă©tĂ© marquĂ©es par leur longueur, ne se terminant quâau 15 aoĂ»t 2023 ,pour les plus ĂągĂ©s dâentre nous, on se rapproche finalement dâune moisson dâil y a quelques annĂ©es. Un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaĂźtre, Ă la fois ancien mais pas si vieux que ça : les annĂ©es 1960. lâĂ©volution fulgurante des machines de moisson, de 1960 Ă nos jours.
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De lieuse Ă batteuse
PremiĂšre grande diffĂ©rence : la moissonneuse-batteuse nâexiste pas, ou du moins elle est loin dâĂȘtre rĂ©pandue. âMon pĂšre en a une dĂšs 1947, mais ce nâĂ©tait pas communâ, Nous autres, nous Ă©tions Ă la moissonneuse-lieuseâ
On le comprend dans le nom de ces machines : la moissonneuse-batteuse moissonne et bat le blĂ© tandis que la moissonneuse-lieuse moissonne et lie. âEn fait, ça formait des bottes, des gerbes quâon devait ensuite relever pour les assembler par six, huit ou dix pour former ce quâon appelait les âcahotsâ. Câest un mot de chez nous ça, je ne suis pas bien sĂ»r de lâorthographe !â,
Ces monticules de blĂ©s Ă©taient ensuite laissĂ©s Ă lâair libre, en champ, pour terminer leur sĂ©chage, en attendant la batteuse : âUn coup de soleil et de vent et ça pouvait aller vite, mais parfois il pleuvait. Dans ces cas-lĂ , il fallait parfois aller ouvrir les monts pour permettre au blĂ© de sĂ©cher et surtout, empĂȘcher quâil ne germe Ă nouveauâ. âAvant, les moissonneuses-lieuses Ă©taient tirĂ©es par des chevaux, puis elles ont Ă©tĂ© tractĂ©es par des tracteurs. Je me souviens que je conduisais le tracteur dĂšs mes 10 ans !â.
âFinalement, on moissonnait environ 10 Ă 15 jours avant le stade auquel on moissonne aujourdâhuiâ, dĂ©crit-il. âAu total, ça prenait entre trois et cinq semaines, sans parler du battage !â, Il fallait ensuite rentrer le blĂ© dans les granges en attendant lâarrivĂ©e de la batteuse, au cours de lâhiver. âOn nâĂ©tait pas stressĂ© comme aujourdâhui, on attendait que la batteuse passe, patiemmentâ, Illustration de cette affirmation : âPar exemple, mon pĂšre ayant une moissonneuse-batteuse, il allait faire la moisson chez les voisins. Ces derniers lâappelaient en juin pour lui demander de passer âquand il pouvaitâ. Rendez-vous compte, ils lui disaient âvous passez quand vous pouvezâ ! Tandis quâaujourdâhui, on appelle un ETA et on lui demande de passer dans lâheure !â,Â
Beaucoup de bras
Les moissons prenaient donc plus de temps mais aussi et surtout, nĂ©cessitaient beaucoup de main-dâĆuvre. âOn Ă©tait minimum cinq dans les champs pour faire les cahotsâ. Ensuite, pour battre, âil fallait dix bonshommes !â. âUne fois battu, le blĂ© Ă©tait mis dans des sacs de 80 kg que les hommes devaient porter jusque dans le grenier⊠Physiquement, les moissons, ça nâavait rien Ă voir avec aujourdâhuiâ.
De fait, lâesprit dâĂ©quipe rĂ©gnait dans les champs. âLâambiance Ă©tait conviviale. On bossait mais on rigolait beaucoup aussiâ, se souviennent-ils. âPendant les moissons, il y avait deux possibilitĂ©s : soit on sâamusait, soit on travaillait avec les autres gamins du village et on allait donner un coup de main. Parfois mĂȘme, les agriculteurs nous donnaient une petite piĂšceâ.âIl y avait des galĂšres mais il y avait aussi un vrai esprit de solidaritĂ©â. âPar chez moi, il y avait aussi beaucoup dâusines. Eh bien les gens venaient travailler aprĂšs leur travail dans les champs !â,Â
âLorsquâon avait rentrĂ© la derniĂšre botte, on faisait le âpersoyeâ, câest-Ă -dire le repas de fin de moisson avec tous ceux qui avaient participĂ©, pour les remercierâ. âĂa mettait une ambiance particuliĂšre, ça faisait partie de la vie rurale. On passait de bons moments.â Une pratique qui se fait encore, mais de maniĂšre plus Ă©parse.
La technologie : pour le meilleur et pour le pire
Puis les moissonneuses-batteuses se dĂ©mocratisent dans les exploitations et font gagner âdu temps et du souciâ. Les premiĂšres mesurent entre 1,50 et 2,50 mĂštres de larges. âLĂ , on avait plus quâĂ se rouler une cigarette et attendre que ça se passe ! Quelle rĂ©volutionâ.
Mais toute avancĂ©e technologique a son lot de dĂ©sagrĂ©ments. âOn nâĂ©tait pas toujours conscient de la puissance de ces nouvelles machinesâ. âIl pouvait y avoir des accidents, faute de prĂ©cautions mais aussi, il faut se le dire, faute de sĂ©curitĂ©. Les moissâ-battâ nâavaient pas de cabine !â.
âCâĂ©tait bien, on avait le soleil sur la tĂȘte, le moteur de la moissâ-batt devant et la poussiĂšreâ.
Au dĂ©but, les moissonneuses-batteuses Ă©taient Ă©quipĂ©es dâun tapis qui faisait remonter le blĂ© sur le âtoitâ de la machine. Des ouvriers y remplissaient des sacs, quâils laissaient ensuite au champ. On remorquant par la suite ces sacs en dehors du terrain avec une âbenneâ tirĂ©e par un cheval. âIl a fallu du temps avant dâen arriver aux machines dâaujourdâhuiâ.
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