L'histoire
À Gulvain, dans la friche de la vallée, au bord du ruisseau qui descend du Niver, se dresse une audacieuse bâtisse en verre et béton, à l'architecture détonante dans ce village aux maisons en pierre.Deux étages de colonnes en béton armé encadrant les verrières. Au-dessus une vaste terrasse. À l'intérieur, une magnifique voûte en forme de coque de bateau prend sous son aile la piste de danse entourée de balcons.
C'était hier
« La guinguette, c'est l'histoire fantastique de Marie et Michel Rolland », disent tous ceux qui les ont connus. Ils ont été les maçons, bâtisseurs, chanteurs et accordéonistes de la guinguette, dancing café, musette, noces et banquets de la belle époque. D'après Suzanne, cela a duré « de 1954, année de mon mariage, à 1967 ».
« Après la Guerre, indique Thérèse, autrefois boulangère, Michel, revenant d'Allemagne où il était prisonnier, a commencé avec Marie, son épouse, à cimenter l'ouvrage de ses mains. Il a pris exemple sur ce qu'il avait vu là-bas, sans doute. »
Bien sûr, cela a pris du temps ! « Les deux faisaient tout. Quelquefois avec quelques amis, se souviennent Jean et Roger. Michel avait installé une roue dans le ruisseau. Elle alimentait en eau son mortier, malaxé dans une barrique ! »
Et devant un peu de découragement ou de fatigue, Michel sortait son accordéon et chantait avec Marie un petit air. Il y en a eu, du monde, à la guinguette, et de beaux orchestres. « Elle ne fermait jamais ses volets, il n'y en avait pas !, plaisante Jean, qui y fêtait le Nouvel an. Comme dit la chanson, les triolets de l'accordéon fusaient et les danseurs affluaient de partout. »
Aujourd'hui, Youn regrette qu'« avec le succès, sont arrivés les cars de Lorient, Brest... Trop de monde, peut-être ! »
La guinguette fantôme
Les accordéons de Marie et Michel sont devenus des boîtes à chagrin et, petit à petit, les lampions se sont éteints. « Pendant des années, Marie a continué à cirer la piste de danse ! », remarque Pierre, nostalgique.
Il y en a tant à raconter sur la guinguette. On y a fait l'école, « et même le catéchisme ! », note encore Pierre. En 2001, François Kronenberger est tombé sous le charme. « Cela ressemblait à un bateau échoué ! », confie l'ancien marinier. Il a voulu retrousser ses manches pour ce bel ouvrage, mais sa santé a fait obstacle. Et la guinguette, porteuse de musique, est à vendre. (OUEST FRANCE du 31/08/2013)