Février 1942. Les ravages de la guerre ne laissent présager d'aucun signe d'apaisement et l'équilibre des forces et des plus précaires.
Dans les eaux sombres de l'Atlantique, les U-boats Allemands rodent, invisibles prédateurs à la recherche de leur proie. Ils attendent, patiemment, parfois en meute, qu'une victime tombe dans le piège.
Ce soir-là, justement, un convoi américain est torpillé par un U-boat. Les flammes dansent dans la nuit, mortelles est éclatantes.
Le Wolf Pack a encore frappé les alliés impuissants et frappera de nouveau. Où et quand, impossible de le savoir. Quelques années plus tard, un U-boat allemand, l'U-559, et repéré au large de la Palestine par le HMS Petard qui largue ses charges de fond sur sa cible. Cette fois, c'est l'équipage du sous-marin qui sait qu'il est perdu: son navire est en train de couler. Il doit l'abandonner. Le lieutenant Anthony Fasson et le matelot breveté Colin Grazier nagent vers le U-boat qui disparaît sous les flots. Repérant des lumières dans le navire, ils découvrent avec stupeur une Enigma à 4 rotors ainsi, qu'un livret renfermant des bigrammes, les clés de codage en cours.
Guidés par l'intuition, les marins emportent la machine et le manuel, sans savoir à quel point leur découverte va s'avérer vitale.
Ils remontent péniblement l'appareil à la surface et le tendent au matelot Tommy Brown, qui les attend à la surface.
Ce sera leur dernier acte de bravoure.
Fasson et Grazier se noieront dans le naufrage de l'U-559.
Tous deux seront décorés à titre posthume de la médaille de George, décernée pour actes héroïques.
Le trésor qu'ils ont remonté est emmené à Bletchley Park, un manoir de la campagne du Buckinghamshire où sont installés les quartiers généraux du Renseignement au début de la guerre.
Ceux qui y travaillent savent qu'ils ont désormais de bonnes chances de craquer les codes navals allemands, qu'ils désignent sous le nom de code "shark".
Cela pourrait modifier la tournure de la Seconde guerre mondiale. Un excentrique jeune mathématicien du nom d'Alan Turing va jouer un rôle prépondérant dans le décryptage du code nazi.
Pour ses collègues, il est un des plus grands esprits du pays, un véritable génie.
Les alliés savent que les allemands utilisent une machine baptisée Enigma pour crypter leurs communications, que des équipes de déchiffrement de Bletchley Park tentent de décrypter. Elles travaillent dans des bâtiments préfabriqués tout neufs, désignés par des chiffres par souci de confidentialité.
Dans l'abri 8, on se concentre sur le chiffrement naval allemand. Les opérateurs Enigma de la flotte allemande sont connus pour être plus prudents que ceux de l'armée de terre, ce qui rend bien plus difficiles les déductions logiques, ou "cribs", permettant de cibler les erreurs des allemands.
Le nombre de possibilités s'est en outre accru avec les machines Enigma à quatre rotors.
Turing, qui travaille sur l'amélioration des bombes électromécaniques (machines de decryptage polonaises), réalise l'importance de développer des machines qui pourraient accélérer mécaniquement le processus de vérification de ces millions de combinaisons.
Avant la guerre, quand il était à Cambridge, Turing avait développé une idée originale, la "Universal Turing Machine", une sorte de super-machine à écrire qui pouvait, entre autres, identifier les symboles, écrire et effacer automatiquement, sans intervention humaine.
Après avoir étudié les machines d'encodage polonaises et une réplique d'Enigma, il sait qu'il lui faut bien plus que la machine qu'il a conceptualisé. Il étudie les mécanismes d'Enigma, ses rotors, son câblage et ses tableaux électriques. Il imagine un système à circuits qui pourrait décrypter les mêmes textes.
Turing sait que l'intervention humaine reste essentielle: des cribs et les opérations mathématiques sont nécessaires pour aider "la Bombe" , cette machine qui doit déchiffrer les messages allemands.
Si les codes Enigma des forces aériennes allemandes sont désormais craqués, ceux des flottes de l'Axe s'avèrent bien plus complexes à déchiffrer.
En 1941, 2 batailles navales décisives mènent à la récupération de documents de chiffrage Enigma.
Grâce à ces informations, Turing va être capable de lire la plupart des messages Enigma de la flotte allemande.
Et en 1942 donc, grâce au sacrifice de Fasson et Grazier, il sera possible de décoder le fameux "Shark".
Le fonctionnement d'enigma
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sources: Arte - Tout sur l'Histoire