Sur les pas de l'abbaye de planselve
Vestige d'un monastère cistercien au rayonnement important au Moyen Age dans la région, l'abbaye de Planselve est aujourd'hui l'apanage de coeur des Gimontois. Ils y retrouvent leur propre histoire à l'origine de Gimont. Il reste simplement la porterie (seul bâtiment en pierre de toute l'abbaye construite en briques) avec ses sept silos à grains, le château de l'abbé, le moulin à eau, le bâtiment des convers, les deux splendides pigeonniers (dont un abrite une glacière) et l'immense mur d'enceinte d'1,5-km, construit en 1500 et servant d'enclos qui porte témoignage de l'étendue du site autrefois. Bâti en 1142, époque de l'essor des abbayes, au lieu-dit «Plana Sylva» près de la rivière Gimone sur des terres offertes à Albert, abbé de l'abbaye de Berdoues, le monastère a vite prospéré, s'attachant même les terres de Cahuzac.
Le pouvoir de l'abbé
Les moines ont crée la bastide de Franqueville en 1265, lui donnant ensuite, fait unique, le nom chrétien de l'abbaye dédié à Notre-Dame de Gimoun, devenue plus tard Gimont. Cela signifiait le double pouvoir civil et religieux de l'abbé de Planselve. Après paréage entre la sénéchaussée de Toulouse, territoire de la bastide, et le comté d'Armagnac, celui de l'abbaye, Gimont a reçu sa charte des coutumes en 1274, le roi de France devenant seigneur et protecteur de la ville et de ses habitants et l'abbé de Planselve leur chef spirituel. En 1331, les cisterciens construisaient l'église de Gimont et un siècle et demi plus tard, après un long règne de puissance, de générosité et de gestion avisée, ils terminaient l'ouvrage conventuel (le mur d'enceinte, la chapelle NotreDame des Neiges aujourd'hui disparue, la chapelle de Cahuzac et le clocher de Gimont).
Prix Goncourt
Les siècles ont passé avec les guerres de religion et les désastres qu'elles ont laissés. La paix revenue, les abbés commenditaires se sont succédé jusqu'à la Révolution. Devenue alors bien d'Etat, l'abbaye fut divisée en plusieurs lots et son église a fourni la brique pour la construction du château de Larroque. Le moulin, si longtemps exploité par les moines, est devenu propriété de la famille Brousté dont un meunier Urbain a si bien conté, dans un roman nominé au prix Goncourt 1939, l'histoire de la fondation de l'abbaye. De nos jours, ces traces de Planselve font l'objet d'une visite et d'un commentaire détaillés. Ils restent la fierté des Gimontois qui retrouvent les racines de leur ville dans ce site au long passé florissant. Une association de sauvegarde de l'abbaye de Planselve veille à entretenir sa mémoire. Jacques Lajoux, historien local, rassemble des notes sur l'abbaye que Maurice Darolles agrémentera d'images. Ainsi, comme Urbain Brousté et grâce à ces témoins de l'écrit, ce long pan de l'histoire gimontoise durera une éternité.
Le linteau gravé en occitan au-dessus d'une des entrées de N-D des neiges
Un linteau de pierre, avec une précieuse inscription en occitan, est visible de la route dès qu'est découvert, en venant de Cahuzac, l'angle nord-ouest de la muraille. Il domine une des deux entrées murées d'un bâtiment dont subsistent à peine quelques rangées de briques de ce qui fut sa façade. Le texte apporte des renseignements intéressants : L'AN MD MOSSU PEY DE BIDOS ABAT FEC LA PRESENT CAPERA LE LA CLAUTURA . Traduisons : l'an 1500, Monseigneur Pierre de Bidos, abbé, fit faire la présente chapelle le (au lieu de « et ») l'enceinte. Car le graveur, illettré ou distrait, peut-être les deux, s'est trompé ; mais il a rattrapé son erreur en ajoutant « et » après l'annonce. A vous de faire la substitution pour que la phrase retrouve tout son sens. Un linteau en occitan MOUSSU (monsieur ou monseigneur), CAPERA (chapelle)... Des noms du terroir qui n'ont pas bougé en un demi-millénaire. Archive précieuse, cette inscription s'ajoute aux mots gascons émaillant les chartes du 12eme siècle de l'abbaye de Planselve où le texte latin laisse filtrer des termes que l'on retrouve dans l'occitan moderne : Blat (blé), Bosc (bois)... et souvent erbatges (herbages), révelateur de l'importance de l'élevage.