Saint Léger était
orné de toutes les vertus, quand il fut promu à l’évêché
d'Autun. A la mort du roi Clotaire, il fut étrangement accablé par
le soin des affaires du royaume; mais, par la volonté de Dieu et de
l’avis des seigneurs, il établît roi Childéric, frère de
Clotaire, jeune homme d'une haute capacité. Ebroïn, de son côté,
faisait tous ses efforts pour élever sur le trône Thierry, frère
de. ce Childéric ; ce n'était pas l’intérêt de l’Etat
qui l’animait, mais c'est qu'ayant perdu le pouvoir et
s'étant attiré la haine de tous, il avait à redouter la colère du
prince et des seigneurs. Ebroïn effrayé entra dans un monastère,
après en avoir demandé l’autorisation au roi. Quand elle lui
eut été accordée, Childéric mit son frère Thierry sous bonne garde,
de peur qu'il ne machinât quelque complot contre le royaume, et,
grâce à la sainteté et à la prévoyance de l’évêque, on jouit
généralement d'une paix merveilleuse. Peu après cependant, le roi,
entraîné au mal par de mauvais conseillers, conçut une haine
tellement profonde pour l’homme de Dieu, qu'il s'attacha à
chercher l’occasion et les moyens de le faire
mourir..
Or, l’évêque, qui supportait tout avec douceur et qui
accueillait ses ennemis comme s'ils eussent été ses amis,
s'arrangea avec le roi pour qu'il célébrât la fête du jour de
Pâques dans la ville dont il était le prélat. Et, cette nuit-là
même, on lui dit que le roi avait décidé de mettre à exécution,
précisément dans la nuit de Pâques, ses projets de mort contre sa
personne. Mais le saint, qui ne craignait rien, dans ce même jour
avec le roi, et échappa à son persécuteur en allant servir le
Seigneur dans le monastère de Luxeuil, où il rendit les services de
la charité la plus attentive à Ebroïn, qui y vivait caché sous
l’habit monacal.
Peu de temps après, le roi mourut, et Thierry fut élevé sur le
trône. Ce fut à cette occasion que Léger, touché des larmes. et des
prières de son peuple et forcé par les ordres de l’abbé,
retourna à son siège.
Aussitôt encore, Ebroïn jeta le froc et fut établi sénéchal du
roi. S'il avait été méchant auparavant, il devint bien pire après;
aussi employait-il tous les moyens pour parvenir à faire occire
saint Léger. Des soldats furent envoyés pour le prendre, et quand
Léger le sut, il céda à leur fureur, et au moment qu'il sortait de
la ville, revêtu de ses habits pontificaux, les soldats se
saisirent de sa personne et lui arrachèrent aussitôt les yeux.
Deux ans après, saint Léger fut amené au palais du roi avec son
frère Garin, que Ebroïn avait exilé. Comme il répondait avec calme
et sagesse aux insultes d'Ebroïn, cet impie ordonna que Garin fût
écrasé à coups de pierres, et que le saint évêque fût mené une
journée entière, nu-pieds, dans le lit d'un fleuve qui roulait sur
des pierres très aiguës. Mais apprenant qu'au milieu de ces
tourments, saint Léger louait Dieu, il lui fit couper la langue;
après quoi, il le confia à un gardien vigilant, dans
l’intention de le réserver à de nouveaux supplices
Cependant, le saint évêque ne perdit pas l’usage de la
parole, mais il prêchait et exhortait comme il le pouvait ; il
prédit encore à quelle époque et de quelle manière Ebroïn et lui
mourraient. Alors, une lumière immense en forme de couronne entoura
sa tête ; beaucoup de ceux qui en furent les témoins lui
demandèrent ce que c'était. Mais le saint, après s'être prosterné
en prières, rendit grâces à Dieu et avertit tous les assistants
d'améliorer leur conduite.
Quand Ebroïn fut instruit de cela, il envoya de colère quatre
bourreaux auxquels il donna l’ordre de couper la tête à Saint
Léger. Or, pendant que ceux-ci le conduisaient, il leur dit : «
Vous n'avez pas besoin de vous fatiguer plus longtemps :
accomplissez ici' les voeux de celui qui vous a envoyés. » A ces
mots, trois d'entre eux furent tellement touchés qu'ils se jetèrent
à ses pieds, en lui demandant pardon; mais le quatrième, après
l’avoir décapité, fut aussitôt saisi par le démon, et termina
misérablement sa vie en se précipitant dans le feu.
Deux ans après, Ebroïn apprit que le corps du saint homme
opérait de nombreux et éclatants miracles; toujours rempli d'une
misérable jalousie, il envoya un soldat afin de savoir par lui ce
qu'il y avait de vrai en ce bruit. Or, ce soldat orgueilleux et
insolent, ne fut pas plus tôt arrivé, qu'il frappa du pied la tombe
du saint, en s'écriant « Meure celui qui pense qu'un mort puisse
faire des miracles ! » Mais il fut bientôt saisi par le démon et
mourut subitement. Cette mort rendit encore le saint plus
célèbre
A ces nouvelles, Ebroïn, de plus en plus outré d'envie, prit
tous les moyens d'étouffer la renommée de saint Léger; mais, selon
que celui-ci l’avait prédit, cet impie périt traîtreusement
par le glaive. (source :www.abbaye-saint-benoit.ch)