Le Haut-fourneau du
Dorlon.
Deux raisons expliquent la
construction de ce haut-fourneau voisin de celui de
Buré-la-forge.
Buré avait épuisé les ressources en
bois les plus proches. En s'implantant en amont dans la vallée, on
se rapprochait de la grande forêt domaniale. D'autre part, après
avoir conquis cette région en 1680, le Roi Soleil reprend la guerre
en 1689 contre la Ligue d'Augsbourg. Pour fabriquer des armes, il
décide aussitôt de réquisitionner le fer fabriqué par les moines
d'Orval à Buré, considéré comme l'un des meilleurs du royaume.
Deux ans plus tard, Louis XIV
ordonne aux moines de construire un haut-fourneau en amont, à
mi-chemin encre leurs granges de Villancy et de Buré, sous peine de
confiscation du terrain. Ce haut-fourneau du Dorlon fonctionne dès
l'année suivante. en 1692. Les bâtiments annexes sont limités à une
halle à charbon de bois, puisque cette nouvelle installation est
liée à la forge de Buré.
Nous avons sous les yeux les
installations du milieu du XIXe siècle, modifiées au fil du temps.
Mais le site semble avoir peu évolué depuis l'origine. L’eau,
pour actionner les soufflets, arrivait par la gauche. On aperçoit
une ouverture dans le mur au ras du sol. Le Dorlon, qui prend sa
source un peu plus haut, coule de l'autre côté de la route. Un
canal de dérivation, dont on devine le tracé clans le pré,
permettait d'actionner une roue à aubes. Ici, il n'y avait pas
d'étang comme à Buré. Pour compenser la faible puissance du
ruisseau, le haut-fourneau a donc été installé dans une fosse. La
grande roue hydraulique de 6 mètres de diamètre se trouvait à
gauche de l'édifice. au-delà du petit muret. Cependant, malgré ce
système, le ruisseau ne permettait un fonctionnement que 6 mois sur
12. A l'origine, la halle de coulée était entièrement couverte pour
protéger la fonte en fusion de l'eau. Leur contact provoque des
projections dangereuses.
Derrière le haut-fourneau se trouve
la grande halle à charbon de bois dont les murs sont renforcés par
de puissants contreforts. Il fallait de grandes quantités de bois
pour alimenter ces hauts-fourneaux : au moins 1 hectare de forêt
était nécessaire pour produire 4 tonnes de fonte. Une passerelle
permettait de charger le gueulard.
Pendant les 12 premières années, les
trois hauts-fourneaux des moines, au Dorlon, Buré et Orval ont
tourné à plein rendement. Puis en 1704, après la fin de occupation
française, les religieux réorganisent entièrement leur entreprise.
Buré est arrêté car la forge est trop vétuste et manque de bois. Le
Dorlon mieux situé pour s'approvisionner en bois, prend le relais.
Les ateliers se spécialisent : le Dorlon coule le fer fort à partir
du minerai de Saint-Pancré et Orval le fer tendre. Toutes les
gueuses de fonte produites ici partent vers les forges d'Orval où
elles sont transformées. L'entreprise atteint son apogée au milieu
du XVIIIe siècle.
En 1764 la production totale des
deux sites est de 816 tonnes, dont 355 pour le Dorlon, ce qui place
l'abbaye en tête parmi les entreprises sidérurgiques de l'époque.
Les moines profitent aussi de l'avantage d'avoir leurs ateliers
implantés sur plusieurs pays.
Mais cette fabuleuse histoire
s'arrête brutalement en 1797 avec la Révolution française et la
suppression de la communauté d'Orval.
Racheté par un particulier, le
Dorlon continuera à fonctionner. Le haut-fourneau du Dorlon est
modifié une 1ère fois avant 1848.
Puis en 1853. il est transformé une
dernière fois et devient cylindrique. .
Il ne fonctionnera que pendant 6
ans, avant de s'arrêter définitivement en 1859.