CONSTRUCTION DE LA
LIGNE DE CREIL A SAINT-QUENTIN ET DE NOYON A SAINT-QUENTIN
(1845-1850).
1. - La lignes de
Creil à Saint-Quentin fut une des premières lignes de chemin de fer
construites en France. Aussi, il est intéressant de remplacer la
construction de cette ligne dans l'histoire générale du rebut du
chemin de fer en France et en Europe.
Dès la fin du XVIIIe
siècle, les mineurs anglais utilisaient, pour le déplacement de
leurs bennes, des voies formées de deux bandes parallèles de bois,
puis de fonte, puis de fer. En 1814, Stephenson fit marcher la
première locomotive qui parvint à tirer 8 wagons pesant 30 tonnes à
la vitesse de 8 kms à l'heure. En 1825 le même Stephenson fit
fonctionner le premier train transportant des voyageurs de
Darlington à Stockton, Au début en France comme en Angleterre, les
voies ferrées, étaient des moyens d'acheminer le charbon d'un
bassin houiller vers les plus proches voies navigables. C'étaient
des entreprises entièrement privées. Le gouvernement français fit
ainsi les concessions les lignes de Saint-Étienne à Andrézieux
(1823), d'Andrézieux à Roanne (1828), de Saint-Étienne à Lyon (
1826) et d'Epinac, dans le bassin du centre, au canal de Bourgogne
(1830). Ces lignes furent ouvertes de 1828 à 1834. Tous ces chemins
de fer ne devaient transporter que des marchandises lourdes, du
charbon. Le transport était jugé plus économique que par la route.
Du reste, la traction n'était faite par des locomotives que sur les
pentes douces et les plans horizontaux.
Sur les pentes droites
ou sur les trajets sinueux, des chevaux et des bœufs devaient
tirer les wagons, ou bien des machines fixes hissaient les voitures
au moyen de cordes. Dans les descentes on utilisait la pesanteur du
chariot des freins reins réglant sa chute.
Jusqu'en 1842, on ne
construisit galère que des lignes d'intérêt local : après les
lignes citées plus haut on ouvrit les lignes d'Alès à Nîmes de
Montpellier à Sète, de Paris à Saint-Germain et de Paris à
Versailles (1835-1837). Seules ces trois dernières lignes
transportèrent des voyageurs. En dehors des Saint-Simoniens,
personne en France n'était tellement partisan des chemins. de fer.
Notre pays était alors en retard peur cela sur l'Angleterre, les
États-unis et la Belgique, voire même sur la Prusse et les autres
États allemands.
Toutefois dès
1833-1835, l'administration des travaux publics avait étudié le
projet de cinq lignes partant de Paris pour aboutir à des grandes
villes de France. Nous verrons plus loin qu'elle avait étudié aussi
à cette époque la ligne de Paris à Saint-Quentin. En 1837 un autre
grand projet, présenté cette fois par le gouvernement (Mo1é)
prévoyait sept grandes lignes à partir de Paris. Mais la Chambre le
repoussa Ce n'est qu'en 1842 que le projet du gouvernement passa
(loi du 11 juin 1842) .
A partir de cette date
les concessions pour la construction de ces lignes et d'autres se
multiplièrent. Celle de Paris à la frontière belge date de 1845: ce
fut donc une des premières après cette importante loi de
1842.
Le gouvernement dut
consacrer 1 milliard pour fortifier et armer la France, à la suite
de la crise de 1840. A cette époque, en effet notre pays fut sur le
point d'être mis guerre avec le reste de Europe a cause de la
rivalité entre le pacha d'Égypte Méhémet Ali et le sultan de
Turquie. Il n'était donc plus question comme on avait pensé le
faire un certain temps que l'État prit entièrement à sa charge la
construction des lignes de chemin de fer. Cela, pour éviter de
créer de grandes corporations dans l'État dont l'existence est
incompatible avec la liberté comme disait Lamartine, Mais on fit un
compromis entre la nationalisation complets et la libre entreprise.
Ce compromis dura jusqu'au 1937 dans toute la France sauf dans
l'objet. L'État devait acquérir le terrain des lignes de chemins de
fer, construire les voies et les gares et en rester le
propriétaire. Les compagnies fermières devaient armer les voies
fournir le matériel roulant et avoir la charge de
l'entretien.
La construction de la ligne de Creil
à Saint-Quentin.
La loi du 15 juillet
1845 fixe le tracé du chemin de fer de Creil à Saint-Quentin par
Compiègne -Noyon et laisse carte blanche au ministre des Travaux
publics pour décider du trace entre Noyon et Saint-Quentin. Dès 1
1835 les ingénieurs des Ponts- et-chaussées avaient étudié un tracé
entre Paris et Saint-Quentin, ainsi que je l'ai déjà dit plus haut.
Ils avaient adopté entre Noyon et Saint-Quentin le tracé le plus
direct.
Mais dans son rapport
du 20 août 1845, l'ingénieur en chef directeur de la Ligue : M.
Onfroy de Bréville étudie deux tracés de Noyon à
Saint-Quentin:
1 ° - L'un le tracé direct, place
Noyon à sa droite, remonte la vallée de la Verse, passe près de
Guiscard, coupe vers Villeselve le faîte qui sépare le bassin de
l'Oise de celui de la Somme, laisse Ham sur sa gauche à 6 kms,
passe à Cugny et arrive à Saint-Quentin en suivant le côté droit de
la vallée de la Somme. C'est là le tracé étudié dès
1835.
2° - L'autre se sépare
à Pont-l'Évêque, au sud de Noyon du tracé N° 1 continue de suivre
la vallée de l'Oise passe à Chauny se rapproche de La Fère jusque
vers la rencontre du canal Crozat, construit à. la fin du XVIIIe
siècle puis longe ce canal à peu près sans interruption jusqu'à
Saint-Quentin. C'est le tracé actuel de la ligne.
Après étude, le
premier tracé ne passe plus à Villeselve mais à Colllezy (1) point
plus bas de 5 m. 40. Du reste, le trajet se trouve réduit de 1 .400
m. et le nombre de maisons à démolir est moins grand. Le faîte le
plus élevé celui de Fontaine-les- Clercs, près de Saint-Quentin,
dépasse seulement de 46 m 04 l'origine et de 9 m. 04 l'a privée. Ce
tracé a 41 .572 m. de long et l'autre 47.979 m.
Les stations sont au
nombre de six sur la première ligne : Noyon Bussy, Guiscard,
Eaucourt, pour la ville de Ham, Seraucourt et Saint-Quentin (Bussy
peut être supprimé), et cinq pour le tracé par Chauny : Noyon,
Chauny, Tergnier pour La Fère, Montescourt et
Saint-Quentin.
Sur la demande du
ministre de la guerre on étudie un troisième tracé : il doit passer
par Chauny, Tergnier, La Fère, remonter la vallée de l'Oise jusqu'à
Berthenicourt et de là, rejoindre Saint-Quentin par
ltancourt.
Le ministre fait alors
créer trois commissions d'enquête, une par département Intéressé
(l'Aisne, l'Oise et la Somme) et fait mettre dans les préfectures
et Sous-préfecture de ces départements des cahiers où les gens
peuvent présenter leurs veux.
Enfin, les assemblées:
administratives des collectivités intéressées : conseils générales
conseils municipaux chambres des arts et manufactures (ancêtres des
chambres de commerce actuelles), etc... firent lient de nombreux
rapports.
Les principaux partisans
du tracé direct étaient les suivants :
1 les villes de Guiscard,
Ham Péronne et Nesles soutenues par :
2 la chambre de commerce
d'Amiens
3 le conseil général de
la Somme,
4 la commission d'enquête
de la Somme,
5 la chambre des arts et
manufactures attires de Beauvais
Mais, la chambre des
arts et manufactures et le tribunal de commerce de Saint-Quentin
étaient aussi pour ce tracé, contrairement au reste du département
de l'Aisne ainsi que nous allons le voir.
Les collectivités et
personnalités suivantes se prononcèrent pour le tracé par Chauny :
les villes de Chauny et Laon, et les habitants du Laonnois, même
assez éloignés de la future ligne, comme les industries d'alun de
Chailvet et Urcel. Ils furent soutenus par : le conseil général
inégal, la commission On d'enquête et le préfet de l'Aisne ai ainsi
que par la commission d'enquête et le préfet de l'Oise. La
commission d'enquête de l'Aisne était composée de treize membres
dont trois représentants de Saint- Quentin deux de Chauny, un de
Quessy, un de La Fère, deux de Laon, un de Vervins un de Guise et
deux indéterminés. Elle se prononça à 9 voix contre 4 pour le tracé
par Chauny et la commission de l'Oise se rallia au même tracé par 6
voix contre 3.
Enfin, les partisans du
tracé par ltancourt étaient
1 * le ministre de la
guerre, président du conseil : le maréchal Soult, duc de
diplomatie, qui voulait que le tracé passât au moins par La Fère
quitte à revenir ensuite directement sur Saint-Quentin, par Liez ou
Ly-Fontaine et Hinacourt Vous verrez plus loin pourquoi le ministre
de la guerre s'était prononcé pour ce tracé.
2* les habitants de la
vallée de l'Oise de La Fère à Moy s'étaient aussi prononcés pour ce
tracé mais ils ne furent pas du tout soutenus par la commission d'
enquête et le conseil général de l'Aisne.
Quels étaient les
différents arguments mis en avant pour soutenir ces différents
tracés ? Voyons d'abord les arguments en faveur du tracé par Chauny
: on peut les répartir en arguments techniques en arguments
économiques et démographiques et enfin en arguments
stratégiques.
Voici, en détail les
arguments techniques : Le tracé est plus long, certes, de 6 kms 398
mais on doit franchir 14 m. 50 de hauteur de moins que par l'autre
tracé, car il n'y a pas de contrepente. Dans le tracé direct le
passage du faite s'opère à l'aide d'une rampe inclinée de 5
millièmes sur 2.500 m. de longueur. Dans le tracé par Chauny, les
rampes sont de 3 mm. par mètre au maximum et si l'on veut déduire
l'excédent de la dépense du tracé par Chauny sur la dépense du
tracé direct on pourrait, tout au plus faire passer le faîte entre
les vallées de l'aide et de la Somme par des rampes de 3,7 à 4 pour
1 .000 m. A cette époque, les locomotives ne pouvaient encore
gravir que les pentes assez faibles.
Le tracé par Chauny
serait réalisable en un an alors que la construction du tracé
direct demanderait deux ans. En effet, pour celui-ci, il faudrait
faire 1.405.000 m3 de déblais dont 408.000 pour la seule tranchée
du faîte à Collezy , contre 1.330.000 m3 dans le tracé par Chauny.
Or, une année de plus d'exploitation rapportera 500.000
frs.
Cette considération rend
le prix de la construction du tracé par Chauny moins cher que celui
de la construction du tracé direct. En effet , celui-ci coûterait
10.799.000 frs , alors qu'il faudrait payer 11.120.000 frs pour le
tracé par Chauny. La différence serait de 321.000 frs. On pourrait
du reste la réduire à 143.000 frs, en adoptant, comme le le disais
plus haut, des pentes de 3,7 ou 4 pour 1000 . Cette différence
serait donc largement amortie par une année d'exploitation en plus
rapportant 500.000 frs . Enfin, le tracé par Chauny favorise les
embranchements vers La Fère-Reims et vers Mézières par la vallée de
la Serre.
Passons maintenant aux
alignements économiques et démographiques : Ce tracé desservira le
département de l'Aisne jusqu'à Soissons et Laon Celui-ci n'a pas
encore de voie ferrée alors que celui de la Somme a le chemin de
fer du nord Paris-Lille par Amiens et Albert. Le nombre des
voyageurs et le tonnage de marchandises transportées annuellement à
partir de Ou en allant à Chauny et à La Fère sont supérieur à ceux
transportés à partir de ou en allant à Ham et Guiscard. Dubois
auditeur au Conseil d'État avait fait un relevé des voyageurs et
des marchandises qui parcouraient les deux lignes de Ham et de
Chalons en diligences. Mais il n'avait pu se procurer le nombre des
voyageurs en poste ou par voitures particulières.
A ces chiffres favorables
au tracé par Chauny, on objectait que ta plus grande partie du
tonnage transportée à l'époque par le canal, à partir de ou en
allant à Chauny ne serait jamais transportée par le train. Ce
tonnage était, en effet, trop encombrant pouf utiliser le chemin de
fer et le transport en serait trop onéreux par la voie ferrée Mais,
les administrateurs de la glacerie et fabrique de produits
chimiques de Saint-Gobain répondent à cela que le sel et la
houille, dont ils ont besoin, seront au contraire de préférence
transportés par voie ferrée.
Pourquoi ? : Le sel,
parce qu'il s'altère à d'humidité des canaux qu'il perd une partie
de son poids en se dissolvant dans l'eau qui se trouve au fond des
bateaux cette perte est très considérable quand à l' époque des
chômage des canaux, les bateaux sont retenus en route pendant des
mois entiers . La houille parce qu'il faut pour parer aux
éventualités des chômages des canaux, faire des approvisionnements
longs et coûteux et que le meilleur charbon perd pendant six mois
d'approvisionnement 15 à 18 % parce que, pendant le transfert par
eau, les bateliers ont l'habitude de prendre la quantité de charbon
nécessaire à leur usage dans les stocks qu'ils transportent ! (Cet
usage était très curieux et il subsiste encore aujourd'hui). En
Angleterre du reste les charbons étaient déjà transportés par voies
ferrées dès cette époque.
On disait aussi que la
population desservie était plus importante que celle qu'aurait
traversée le tracé direct. Dubois, le même auditeur au Conseil
d'État dont j'ai déjà parlé plus haut, avait fait pour chaque
tracé, le relevé des populations de toutes les communes situées à 5
kms de distance, à droite et à gauche du chemin de fer et celui des
contributions de toutes espèces payées par ces
communes.
Dans le premier tracé,
deux communes dépassent 2.000 habitants ,et quatre 1.000 h. Dans le
deuxième, Chauny a 5. 154 habitants, La Fère 3.91 1 et
Flavy-le-Martel 2.365.
Les partisans du tracé de
Chauny ajoutaient que des grandes propriétés peu peuplées se
trituraient sur le plateau de Ham Guiscard, tandis que dans la
vallée de l'Oise il y avait de nombreuses petites propriétés de
maraîchers.
On devait prolonger le
chemin de fer jusqu'au Belgique. Trois possibilités s'offraient :
on pouvait passer soit par Cambrai Valenciennes en suivant la
vallée de l'espace soit par Le Cateau-Cambrésis en se plaçant sur
le plateau qui sépare l'Escaut de la Sambre (ce qui s'est
effectivement passé par la suite), soit par Guise, Landrecies,
Maubeuge en suivant la vallée de la Salubre. Dans ce troisième cas
si on adoptait le trace par Chauny, Saint-Quentin risquait de se
trouver sur un embranchement secondaire, la grande ligne passant
dans la vallée de l'Oise. Mais les ingénieurs ont rassuré
Saint-Quentin, en disant qu'on pouvait aller de Saint-Quentin à
Bernot sur l'Oise par Harly et Homblières sans rencontrer
d'obstacles sérieux On n' allait donc pas faire un chemin de 30 kms
de Tergnier à Bernot par la vallée de l'Oise, alors qu'il suffisait
d'en faire un de 15 kms de Saint-Quentin à Bernot.
Le dernier argument en
faveur du tracé par Chauny est stratégique : la ligne se rapproche
de La Fère et passe à 5 kms de cette place. Ainsi on pouvait soit
amener des renforts de Paris à La Fère soit conduire des rudiments
de La Fère dans la capitale, en cas de troubles. La Fère venait
d'être de nouveau fortifiée à la suite de la crise de 1840, dont
j'ai parlé plus haut.
Contre ces nombreux
arguments les partisans du Tracé direct donnaient également force
raisons en faveur de leur thèse : nous allons les passer en revue
en les groupant de la même manière : D'abord les arguments
techniques : l'argument-massue est que le tracé par Guiscard est
plus court de 6 kms 400. La dépense en est également moindre :
10.719.000 frs contre 11.120.000 frs.
Distinguons dans les
arguments économiques et démographique les arguments généraux des
raisons propres à chaque ville : Saint-Quentin, Ham et Péronne,
Chauny et Saint-Quentin n'ont aucun rapport de commerce alors que,
dans la région de Ham et de Péronne se trouvent de nombreux paysans
qui tissent la laine et le coton des étoffes vendues par
Saint-Quentin, Au risque de contredire un peu l'argument précédent
les partisans de ce tracé affirment que les produits de l'industrie
chimique de Chauny s'écoulent soit à Saint-Quentin et Ham pour
servir au blanchiment des toiles soit dans les nombreuses fabriques
de sucre des environs. Mais ils ne vont pas à Paris et il est ainsi
inutile de relier Chauny à Paris par une voie ferrée.
La grande route de
Saint-Quentin à Paris passe par Ham et non par Chauny et les deux
principales voies de Paris vers les Flandres passent par Ham et
Péronne.
Les localités de la
vallée de l'Oise (lut déjà une route royale et un canal. Les
localités du plateau n'ont qu'une route royale.
-Les industries qui se
trouvent dans la région de Ham sont en partie des industries
textiles Nous avons vu, en effet, que de nombreux paysans de la
région tissent la laine et le coton pour les marchands de
Saint-Quentin, Celles-ci sont soumises aux fluctuations de la mode
et exigent, par conséquent, un transport plus rapide que les
productions de Chauny.
La multiplicité des
stations prévues pour le tracé direct : 6 contre 5 pour le tracé
par Chauny alors que celui-ci est plus long de 6 kms 400 prouve que
le premier tracé est plus utile que le second. En f ait nous avons
vu que la station de Bussy du tracé direct pouvait être supprimée,
ce qui mettait à égalité les deux tracés sous ce rapport. Même en
conservant Bussy, la supériorité du tracé direct était bien mince
et cet argument était assez spécieux.
Arguments invoqués par
chaque ville : Comme la ligne, d'après la loi d'août 1845, est
faite avant tout, pour desservir Saint-Quentin elle doit le faire
par le tracé le plus direct. Sans cela les prix du transport des
voyageurs et des marchandises de Saint-Quentin à Paris seraient
argumentés en proportion du nombre de kilomètres qu'on ajouterait à
ce tracé direct.
Ham est le centre de
nombreuses fabriques de sucre : 40 fabriques expédient 4.000 tonnes
par an sur Paris. (Avant 1914, les nombreuses sucreries étaient de
très petites usines de moins de 50 ouvriers en périodes inter
campagnes, dispersées dans les pays producteurs de betteraves.
Après 1918 ces petites usines, détruites pendant la guerre, furent
remplacées par quelques grandes entreprises).
Dans les sept premiers
mois de 1845, 51 .782 moutons ont traversés Ham allant vers Paris.
Cent voitures de légumes vont chaque semaine de Ham à Saint-Quentin
(Ces légumes devaient venir des hortillonnages de la vallée de la
Somme) quatre moulins à blé envoient chaque semaine 200 hectolitres
de farine à Saint-Quentin. En retour cette ville expédie à Ham pour
2.500 tonneaux d'objets de fonderie, épicerie, marbre
etc...
De Ham à Noyon, il y a 20
kms d'une route très difficile et Noyon sera à 108 kms de Paris par
le rail alors que par la voie ferrée Ham serait à environ 130 kms
de Paris.
L'intérêt de Péronne est
également au tracé direct ; cette ville est reliée à Albert où
passe le chemin de fer Paris-Lille, par 24 kms d'une route
difficile et accidentée et Albert est à 177 kms de Paris par le
chemin de fer Péronne, par ailleurs, serait à 29 kms de la gare de
Ham, si l' on adoptait le tracé direct. Cette gare, elle-même
serait à 145 kms de Paris. Les habitants de Péronne, allant à
Paris, auraient donc 27 kms de moins à faire en passant par
Ham.
Voici, en substance ce
que disait le ministre de la Guerre, le maréchal Soult : " Comme on
doit continuer le chemin de fer jusqu'à Cologne, en Allemagne, il
faut absolument qu'il passe à portée du canon de la place de La
Fère. Sans cela il constituerait une magnifique voie d'invasion "
Or même dans le tracé par Tergnier, la ligne n'était Pas à la
portée des canons de l'époque qui se trouvaient à la Fère, à 5
kms.
Pour éviter de faire le
grand viaduc final de cette ligne, les habitants de la Vallée de
l'Oise de La Fère à Berthenicourt, prétendaient qu'au lieu de
construire la ligne jusqu'à Saint-Quentin, On pouvait très bien
s'arrêter au faubourg d'lsles.
Mais les arguments qui
s'opposaient à cette ligne étaient nettement plus nombreux, C'était
tout d'abord de nombreuses raisons techniques : Les difficultés
auraient été considérables pour franchir le plateau entre l'Oise et
la Somme : il attrait fallu faire un déblai de 6 à 700.000 m3 entre
Saint-Quentin et ltancourt contre 408.000 m3 à Collezy dans le
tracé direct, ce qui était déjà considérable.
On devait également
terminer la ligne par un viaduc d'un kilomètre de long et de 27 m.
de haut dans la vallée de la Somme. Ce viaduc aurait été, en outre,
fondé dans des marais tourbeux.
Enfin ce tracé devait
dépasser de 1 4 kms 400 le tracé direct et de 8 kms le tracé
moyen.
Une raison économique
s'opposait aussi à cette variante : Si la ligne se prolongeait plus
au nord, Saint-Quentin serait sur une voie secondaire : il y aurait
une voie principale Berthenicourt-Bernot suivant la vallée et une
ligne secondaire se détachant de la précédente et allant à
Saint-Quentin. Or la loi, votée au Parlement veut avant tout faire
une ligne Paris- Saint-Quentin.
Voici la conclusion de ce
débat long et passionné le 20 octobre 1845, le conseil général des
Ponts-et-chaussées adopte à l'unanimité les conclusions du rapport
de sa commission, malgré d'objection d'un des membres sur la
prolongation de 6 kms 400. Or ces conclusions sont favorables au
tracé par Chauny. L'arrêté du ministre, secrétaire d'état aux
Travaux publics du 12 novembre 1845 entérine cette décision du
conseil général. Voici les termes de cet arrêté qui constitue, en
quelque sorte, l'acte de naissance de la ligne actuelle
Noyon-saint-Quentin:
« Article Premier.
Le tracé de chemin de fer de Creil à Saint-Quentin, entre Noyon et
Saint-Quentin sera dirigé par Chauny, Tergnier, Montescourt et
Gauchy ».
CONSTRUCTION DE LA
LIGNE
En 1846 le Conseil
Général de l'Aisne émettait le vœux que les travaux de la
ligne Creil-Saint-Quentin soient commencés avant l'hiver prochain
pour que les travaux procurent des ressources à la classe ouvrière
nécessiteuse. En effet la révolution de 1848 a été précédée, dans
toute la France, par une grave crise économique. Mais en 1847 les
travaux ne sont toujours pas commencés.
La révolution de février
1848 arriva et rien n'était encore fait. Le 4 octobre de cette
année la compagnie concessionnaire fit connaître que, bien qu'il
n'entrât point dans ses projets d'exécuter des travaux dans les
environs de Saint-Quentin en 1848, elle n'a pas hésité, aussitôt
que le maire de cette ville l'eut informé de la situation
malheureuse de la population ouvrière à donner l'ordre d'ouvrir à
Saint-Quentin même et dans les communes environnantes des chantiers
exclusivement réservés aux ouvriers du pays. Ce chômage de nombreux
ouvriers en 1848 était en fait général dans toute la France de
l'époque. Il faut rappeler, en particulier les ateliers nationaux
de Paris où l'on employait les ouvriers comme on le pouvait, à des
travaux beaucoup moins utiles que la construction d'une ligne de
chemin de fer.
La compagnie ajoutait
qu'elle était maîtresse de tous les terrains qu'il lui fallait dans
l'arrondissement de Saint-Quentin.
C'est donc là que les
plus grands travaux avaient été faits en 1848. Rien n'avait encore
été commencé dans l'arrondissement de Laon autour de Chauny, mais
les mesures étaient prises pour installer un atelier à Chauny et un
autre à Tergnier en octobre. En novembre 1848 la section
Compiègne.-Noyon était livrée à la circulation ; en septembre 1849,
c'était le tour de celle de Noyon à Chauny ; en novembre de la même
année on pouvait exploiter la partie entre Chauny et Tergnier.
Enfin le tronçon entre Tergnier et Saint-Quentin était terminé en
avril 1850.
En conclusion, on peut
dire que cette ligne de chemin de fer fit la fortune de certaines
localités qui se trouvaient sur son passage et tout d'abord de
Tergnier, Fargniers, Quessy et Vouël.
En effet, peu de temps
après l'ouverture de cette voie ferrée de Noyon à Saint-Quentin, on
en ouvrit le 1er septembre 1857, comme prévu, une autre allant de
Tergnier à Reims L'agglomération que je viens de mentionner se
trouve juste à la bifurcation. Aussi, alors qu'elle avait 1.852
habitants, au total, en 1845, dont 276 pour terminer, elle en a
maintenant 14.559 (dont 5.002 pour Tergnier).
De même, Saint-Quentin et
Chauny bénéficièrent aussi dans une certaine mesure de cette ligne.
Elles ont respectivement actuellement 53.866 habitants et 10.544
contre 2 1.400 et 5. 154 en 1845. Seule, La Fère est restée
stationnaire avec 3.485 habitants aujourd'hui contre 3.911 en
1845.
On peut dire, en résumé,
que si la voie ferrée Noyon-Saint-Quentin était passée par Guiscard
et Ham, Tergnier et son agglomération n'auraient jamais existé et
Chauny se serait moins développée qu'elle ne l'a fait.
On peut également
affirmer que si les voies ferrées Paris- Bruxelles et
Paris-Cologne, au lieu de passer par Saint-Quentin étaient passées
par La Fère et la vallée de l'Oise à 10 kms de Saint-Quentin cette
dernière ville n'aurait pas connu l'essor qu'elle a connu par la
suite et Berthenicourt serait devenu une importante bifurcation. Il
serait arrivé à Saint-Quentin la mésaventure qui est arrivée à
Amiens ou à Orléans : la grande ligne Paris-Lille passe, en effet,
par Longueau à 4 kms d'Amiens et la ligne Paris-Toulouse passe aux
Aubrais à 5 kms d'Orléans.
La gare de Noyon
1914
1935
1970
L'origine de Noyon
s'explique par sa situation de carrefour entre deux grands axes de
communication, Compiègne-Saint-Quentin et Amiens-Soissons,
l'ancienne voie romaine. La gare fut inaugurée par le prince
Louis-Napoléon BONAPARTE le 25 février 1848. Elle était construite
à peu près face à la rue Michelet actuelle. Le trafic y
était très
important.
Avant 1914, les trains
nombreux et rapides reliaient Noyon en 1h30 à 1h45.La gare des
marchandises représentait une grande partie de l'activité puisqu'à
cette époque les transports routiers n'existaient pas. Pour les
grandes distances, il n'y avaient que le canal et la voie ferrée.
Les marchandises arrivaient en gare et les livraisons étaient
assurées dans la ville et aux alentours par des attelages
hippomobiles.
En 1918, la gare ainsi
que tous les cafés et maisons des alentours furent détruits. Une
baraque en planches la remplaça jusqu'en 1930.
Le 7 février 1921,
Monsieur le Maire informe le conseil que la Compagnie du Nord a
présenté un projet de construction. Il est fait mention de la
création éventuelle d'une surtaxe locale de dix centimes sur chaque
billet de voyageurs pour financer la nouvelle construction. En
février 1923, les pourparlers se poursuivent pour l'embellissement
du bâtiment principal, la création d'un passage souterrain entre
les quais de voyageurs ( qui ne sera créé qu'en 1975 ! ) et la
construction d'un passage supérieur pour remplacer le passage à
niveau. Cette construction coûterait à la ville 1 300 000 à 1 700
000 F. Arrive alors le problème de l'emprunt... et en 1928, après
de grosses économies, les travaux purent enfin
commencer.
La gare fut ouverte au
public le 13 janvier 1930. Il aura donc fallu douze années pour la
création de ce projet dont la conception est quelque peu insolite
et jamais vue. Au cours des années qui suivirent, l'environnement
fut particulièrement étudié pour l'aménagement du Jardin Roosevelt
et la réalisation de la roseraie. Le résultat est flatteur et,
semble-t-il, apprécié des voyageurs qui descendent pour la première
fois en gare de Noyon.
Le personnel était
composé essentiellement de chauffeurs, mécaniciens, chefs de gare,
en tout une cinquantaine de personnes.
Le réseau
secondaire
Il y avait 3 lignes
:
Une ligne reliait Noyon à
Roye, avec embranchement desservant Bussy, Guivry,
Beaulieu-les-fontaines, Ercheu, Ognolles, Moyencourt, Breuil,
Languevoisin, Nelse et Offoy.
Une autre ligne,
Noyon-Guiscard-Ham, par Beaurains-les-Noyon, Genvry, Sermaize,
Crisolles, Muirancourt, Guiscard, Villeselve, Golancourt,
Ham.
Enfin, une ligne reliait
Noyon-Lassigny, par Passel, Cannectancourt, Thiescourt, Dives,
Lassigny, se prolongeant jusqu'à Montdidier.
Il y avait trois allers
et retours par jour : 8h,12h et 17h.
Nombreux sont les
habitants de Muirancourt qui emprunter la voies ferrées pour se
rendre à Noyon, mais au fil des années, la fréquentation diminua et
dans les années 50, leur rôle consistait essentiellement dans le
transport des matériaux et, à la saison des betteraves,
l'alimentation des sucreries. Ces lignes furent supprimées en
1956.
Il demeure dans la
campagne quelque gares, comme à Muirancourt souvent isolées des
villages, beaucoup sont habitées, quelques unes abandonnées
attestant qu'il s'est passé là quelque chose!
La locomotive…
Il y avait deux trains
, le premier, « une Micheline » et le second « un tortillard » qui
peut encore vous faire revivre les moments passer à bord (pour les
personnes qui ont connues cette époque) ou donner de la nostalgie
aux plus jeunes....toujours en fonction dans la baie de
somme:
La Locomotive
type 130 Haine Saint
Pierre
Numéro 15
Poids à vide
24,85T
Poids en ordre de marche
32T
Timbre de la chaudière
12,6k/cm²
Surface de la grille
1,00m²
Surface de chauffe
53m²
Diamètre des cylindres
0,360m
Course des pistons
0,460m
Diamètre des roues
motrices 1,025m
Diamètre des roues
porteuses 0,73m
Largeur hors tout
2,45m
Longueur hors tout
8,608m
Hauteur hors tout
3,30m
Cette locomotive
est très solide. Elle continu son service sur le reseaux de la Baie
de Somme. A visiter absolument.(et pas de géocaache sur ce
réseaux...)
Géocaching
Voici ce qui reste de la gare du réseaux secondaire. Les gares dans
les villages ont été revendu, et habitées.
C'était une gare terminus, les voies partaient sous le pont vers la
bifurcation.