C'est fou tout ce qu'on peut découvrir en consultant des archives et de vieux journaux ! Par exemple, cette adresse, banale, du 118 rue des Moines, a été malgré elle mêlée à des faits divers rocambolesques ; concernant tantôt le "gang des cimetières", tantôt une collision entre deux rames du Métro parisien, etc... Morceaux choisis :
- Tout d'abord, si l'on en croit des textes anciens, cet endroit serait celui qui a donné son nom au quartier des Batignolles. "Batignolles doit son nom à un ancien canton de la forêt de Rouvray, ou du moins à une remise ainsi appelée, qui existait avant 1789 le long du Chemin des Boeufs (actuelle rue de la Jonquière) à son point d'intersection avec le Chemin des Moines (actuelle rue des Moines)", peut-on apprendre dans l'ouvrage Les Environs de Paris Illustrés, publié par Adolphe Joanne en 1856.
- Le 3 novembre 1873, le "gang des cimetières" est appréhendé. Cinq de ses membres "qui volaient sur les tombes des couronnes d'immortelles pour aller les revendre à la porte d'entrée", sont arrêtés au Père-Lachaise. Au même moment, 3 de leurs complices connaissent le même sort au cimetière de Montmartre. L'un d'entre eux est pris sur le fait en train d'enlever une couronne sur la tombe de Baudin (Alphonse Baudin, député,tué par balle en 1851 alors qu'il s'opposait au coup d'état de Louis-Napoléon Bonaparte) : "cet individu, Pierre Chomard, est un ancien garde fédéré du 206ème bataillon. Une perquisition sera menée à son domicile, 118 rue des Moines", relate La Presse le lendemain matin.
- Le 26 octobre 1876, un habitant du 118 rue des Moines âgé d'une trentaine d'années fait un arrêt cardiaque en pleine rue à Vincennes. "Il se promenait en vélo, voyant arriver sur lui deux omnibus marchant parallèlement [...] il put passer entre les 2 voitures [...] il n'avait été atteint par aucune des deux voitures, il n'avait reçu aucune blessure ni contusion : il était littéralement mort de peur", notent les journaux de l'époque.
- En juin 1891, c'est un enfant de 12 ans, Eugène Patin, qui est porté disparu après avoir quitté le domicile de ses parents, au 118 rue des Moines, "à la suite d'observations qui lui avaient été faites", indique Le Petit Journal, qui précise que l'enfant portait un pantalon et un veston noirs ainsi qu'un gilet gris. Il ne sera jamais retrouvé.
- Le 27 juillet 1883, La Lanterne raconte l'histoire d'un somptueux tapis d'orient décoré avec "des animaux fantastiques, des oiseaux énormes aux ailes déployées, des éléphants enchevêtrant leurs trompes [...] au centre est représentée la déesse Kali avec ses 4 têtes et ses 8 bras assise sur un trône de granit noir et entourée de serpents multicolores". De grande valeur, il a été déniché dans un "magasin de nouveautés" par un certain Joseph Mouillard, un ancien agent d'affaire déjà condamné 2 fois pour escroquerie. Avec son complice, Jean Marquais, ils se présentèrent alors chez des "gogos parisiens dont ils connaissaient le goût pour les belles choses". La mécanique est bien huilée : Joseph vend le tapis, puis Jean sonne chez l'acheteur et, se faisant passer pour un agent du conseil d'hygiène de la Seine, somme l'acheteur de rapporter ce tapis provenant d'Egypte qui serait un "véhicule de microbes cholériques". Les acheteurs "courent alors chez Joseph Mouillard, 118 rue des Moines, pour le supplier de le leur reprendre". Le manège se répétera 8 fois de suite, jusqu'à ce que les 2 escrocs soient arrêtés après des plaintes des personnes flouées.
- En 1894, une épidémie de choléra (dont le foyer était tout proche, les premiers malades furent des occupants de l'hotel qui était situé au 52 rue de Lévis, à quelques rues de vous) fait rage à Paris. En quelques mois, 900 personnes perdent la vie, dont 53 dans le 17ème arrondissement. Le Bulletin Municipal de la Ville de Paris du 23 septembre évoque la situation et donne les résultats des très nombreuses inspections qui ont été faites dans les immeubles du quartier. Une seule annotation est faite concernant le 118 rue des Moines : "fuites d'eau au plafond d'un logement". Peu mieux faire, certes, mais l'adresse n'est pas classée "insalubre", et s'en sort mieux que d'autres immeubles des Epinettes au sujet desquels on peut lire : "suppression de poules et lapins dans la cour" ; "cabinets à sièges béants" ; "écurie dont les odeurs incommodent les voisins" ; "immondices dans la cour par suite des ordures qu'y jettent les voisins", etc.
- Le 11 octobre 1902, un "dangereux anarchiste" est arrêté au sortir d'un bar rue de la Jonquière. Emile-Henri Augain, 39 ans, est recherché sur mandat du juge d'instruction pour vol avec effraction. Sur lui, les gardiens de la paix saisissent 239 francs, un revolver chargé et une pince monseigneur. L'homme, "affilié à la célèbre bande de l'anarchiste Maugiart à Puteaux" logeait... 118 rue des Moines, comme l'écrit Le Rappel.
- Le 3 janvier 1906 c'est un fait divers dramatique survenu au 118 rue des Moines que relate La Croix. "Mme Trinquet, 70 ans, impotente, renversa, hier, accidentellement sa chaufferette. Les charbons mirent le feu à des brins de bois, et les flammes se communiquèrent aux vêtements de la vieille dame. Lorsque les voisins, mis en éveil par la fumée et les odeurs qui filtraient sous la porte de l'appartement, pensèrent à venir au secours de Mme Trinquet, ils la trouvèrent à demi carbonisée".
- Autre drame typiquement parisien : les quotidiens Le Matin et Le Journal du 21 novembre 1914 évoquent la collision entre 2 rames du Métro ne faisant aucun mort, mais de nombreux blessés. "A 6h30 la rame 155 se dirigeant vers Clignancourt passait à la station de la Cité et 5 minutes après la rame suivante, la 156, stoppait à son tour mais ne reprenait pas sa marche car le disque rouge du block system barrait la voie. Comme il arrive quelquefois que ces appareils ont des ratés, le chef de la station de la Cité téléphona au chef de la station du Châtelet, qui lui répondit que la voie était libre. Mais il s'était produit une confusion grave : la rame qui précédait la 155 venait seulement de quitter la gare et la 155 était arrêtée sous le tunnel à l'entrée de la courbe, c'est à dire hors de la vue du chef de station. Lorsque le chef de la Cité donna l'ordre à la rame 156 de se mettre en marche, il la lança donc involontairement sur la 155, en arrêt avant la station du Châtelet ! Si la collision inévitable se produisit, elle fut atténuée par ce fait que dans les courbes la vitesse est considérablement ralentie. La voiture motrice de la rame 156 tamponna avec violence le wagon de queue de la rame 155. Les 2 trains étaient bondés et ce fut une scène de confusion et d’affolement". Suit une liste de près de 100 noms : les blessés. Parmi eux, un certain Pradillon, domicilié 118 rue des Moines...
- Le 2 avril 1937, L'Humanité affiche en Une la façade du 118 rue des Moines, quelque peu cabossée. "Hier, vers 4 heures du matin, une voiture de livraison Hachette est montée sur un trottoir et a défoncé la devanture d'un magasin de parapluie, 118 rue des Moines", précise le journal. Ci-dessous, vous trouverez cette image :
Enfin, pour conclure, voici une photographie du 118 rue des Moines (l'immeuble est signalé par la flèche rouge) prise en 1905 :
J'espère que vous aurez apprécié cette petite promenade dans le passé, autant que j'ai apprécié faire des recherches au sujet de cette adresse ! J'avoue ne pas avoir choisi cet immeuble au hasard, puisque mon restaurant y est installé, très très près de la cache que vous allez chercher ;)
Si l'histoire vous passionne, n'hésitez pas à tenter également de débusquer le "Trésor de Clichy", en découvrant ma série de caches du même nom dissimulée à Clichy-la-Garenne, de l'autre côté du périphérique !